ACQUISITION IMMOBILIERE : LORSQUE L’ACQUEREUR S’APERCOIT QU’IL NE PEUT RIEN STOCKER DANS LA CAVE DE L’IMMEUBLE VENDU

Permis de construire

ACQUISITION IMMOBILIERE : LORSQUE L’ACQUEREUR S’APERCOIT QU’IL NE PEUT RIEN STOCKER DANS LA CAVE DE L’IMMEUBLE VENDU

Cour d’appel de Rouen, 1re chambre civile, 9 décembre 2020, RG n° 19/00150

L’article 1641 du Code civil dispose que « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus« .

Il résulte de l’acte de vente du 25 octobre 2013 que les parties ont stipulé une clause de non-garantie des vices cachés rédigée en ces termes : « indépendamment des vices de construction relevant des garanties et responsabilités régies par les articles 1792 et suivants du code civil, le vendeur ne sera pas tenu à la garantie des vices apparents ou cachés pouvant affecter le sol, le sous-sol ou les bâtiments, à l’exception toutefois de ce qui est dit sous le titre ‘Environnement-Santé publiqueA cet égard, il est précisé que cette exonération de la garantie des vices cachés ne peut s’appliquer aux défauts de la chose vendue dont le vendeur a déjà connaissance ».

En l’espèce, lors de la première réunion d’expertise du 22 septembre 2015, l’expert judiciaire observe des ‘traces d’inondation sur le mur en béton ceinturant la partie carrelée et sur le meuble posé dans la cave qui se trouvent à 17 cm au-dessus du carrelage« ; lors de la seconde réunion d’expertise du 5 octobre 2016, il observe les traces d’une inondation plus importante qui se trouvent à une hauteur de 30 cm ; il explique en page 9 de son rapport qu’en comparant les niveaux hauts de la Seine début novembre 2013 et début mars 2014 dates auxquelles les inondations ont été constatées par monsieur et madame B., confirmée pour la deuxième par maître L. dans son procès-verbal de constat du 06 mars 2014, il est possible d’établir un lien entre le niveau de la Seine et la présence d’eau dans la cave et ajoute que sur « 3 ou 4 jours consécutifs le niveau a été supérieur à 9 mètres, ces niveaux importants sont non seulement liés au coefficient de marée mais aussi au débit du fleuve d’après le tableau statistique du GRAND PORT MARITIME DE ROUEN » ; il conclut que « les inondations dans la cave sont dues à un phénomène naturel qui est la hauteur du niveau de la Seine qui provoque un accroissement du niveau de la nappe » et préconise la réalisation d’un cuvelage pour rendre la cave entièrement exploitable ou la reconstruction du muret en béton pour rendre la cave partiellement exploitable.

Ll’expert indique que les données fournies par le GRAND PORT MARITIME DE ROUEN entre 2009 et 2015 montrent que le niveau de la Seine a atteint deux fois 9 mètres pendant une période de 3 à 4 jours, la première fois entre le 28 février et le 2 mars 2010 et la seconde fois entre le 10 février 2013 et le 13 février 2013 ; il précise que le phénomène d’inondation de la cave, constaté peu de temps après lavente, préexistait nécessairement à celle-ci ; il souligne d’ailleurs qu’un cuvelage avait été réalisé par l’un des propriétaires précédents afin de rendre utilisable une partie de celle-ci mais que l’ouverture du muret en béton a fait perdre cette possibilité d’exploitation.

Le rapport d’expertise permet d’établir un risque d’inondation préexistant à la vente, nécessairement connu des vendeurs lors de la signature de l’acte authentique ; ces derniers ne pouvaient en effet ignorer la réalisation de ce risque au regard du lien établi par l’expert entre la montée des eaux de la Seine et les conséquences perçues dans la cave avec une fréquence limitée mais réelle, au regard des traces laissées par les débordements d’eau dans le sous-sol ; les conditions d’occupation de l’immeuble par les propriétaires, présentées comme stables durant les trois années précédant la vente, sont en réalité énoncées, sans certitude, quant à la période antérieure ; cependant, monsieur D., ayant réalisé et fait réaliser des travaux, a connu l’évolution du bien de 2005 à 2013 ; monsieur D. a posé un carrelage dans la cave après signature du compromis le 23 juillet 2013 ; s’il soutient ne pas avoir pu identifier du limon tel que décrit par l’expert, il a assurément constaté de façon attentive l’état du sol et des soubassements des murs révélateur des inondations ; il peut être déduit de ces éléments que les vendeurs connaissaient le vice affectant la cave.

Les consorts D.- P., vendeurs, ne peuvent utilement se prévaloir de la communication du plan de prévention des risques naturels, produit mais non signé par les parties comme constituant une annexe jointe à l’acte authentique ; l’acte de vente dispose que certes, la ville est couverte par un plan mais précise aussi en page 10 et en caractères gras que « Le bien vendu n’est pas situé dans la zone du plan de prévention des risques naturels. » ; les acquéreurs ne pouvaient dès lors envisager le risque d’inondations et particulièrement de leur cave ; l’humidité naturelle éventuellement présente ou décelable lors de leurs visites doit être dissociée des débordements d’eau subis.

Le vice affectant la cave compromet son usage en faisant obstacle à tout stockage de biens de toute nature ; les vendeurs auraient envisagé un prix moindre s’ils avaient eu connaissance de la difficulté ; le jugement est confirmé en ce qu’il a écarté la clause de non-garantie des vices cachés, les conditions de mise en oeuvre de la garantie étant réunies.Référence: