TESTAMENT : Il n’a pas été prouvé que le testateur souhaitait que son épouse quitte le domicile conjugal (Cour d’appel de Versailles, Chambre 1, section 1, 12 janvier 2018 , RG N° 15/06372)

TESTAMENT : Il n’a pas été prouvé que le testateur souhaitait que son épouse quitte le domicile conjugal (Cour d’appel de Versailles, Chambre 1, section 1, 12 janvier 2018 , RG N° 15/06372)

Abdelkader C a rédigé, le 4 février 2011, un testament olographe annulant ses testaments antérieurs.

Celui-ci est rédigé ainsi :

« Je prive mon épouse de tous droits en propriété ou en usufruit dans ma succession.
Je précise que mon frère a participé financièrement pour la moitié de l’acquisition de mon bien à […]. Cette participation financière doit faire l’objet d’une reconnaissance de dettes afin de la chiffrer. Au surplus du remboursement de ce que je lui dois, je lègue à mon frère Rachid … la quotité disponible de tous mes biens qui dépendra de ma succession.
En outre, je désire que Rachid soit tuteur aux biens de mes enfants mineurs, à défaut mon autre frère Mohamed et que le conseil de famille ne soit composé que des membres de mon côté à l’exclusion de la famille de mon épouse ».

Cet acte a été déposé le même jour au rang des minutes d’un notaire à Villiers Le Bel.

Abdelkader C est décédé à Pontoise le 5 septembre 2011.

Lors du règlement de sa succession, ses frères et soeurs ont constaté que Mme Hayet M, son épouse, bénéficiait d’un droit d’usage et d’habitation viager sur le domicile conjugal situé […], le notaire indiquant que seule la rédaction d’un acte authentique aurait pu permettre la privation de ce droit.

Si par testament olographe rédigé en l’étude du notaire, le testateur a déclaré priver son épouse de tous droits en propriété ou en usufruit dans ma succession, la veuve bénéficie, selon l’art. 764 du Code civil, d’un droit viager d’usage et d’habitation dès lors qu’aucun acte authentique n’a été reçu pour la priver d’un tel droit. Le notaire tenu d’informer et de conseiller pour assurer la pleine efficacité des actes auxquels il prête son concours et permettre à ses clients de choisir l’acte le plus efficace pour respecter leur volonté, n’a pas informé son client de l’existence du droit viager et de la nécessité de recourir à l’acte authentique pour priver l’épouse de ce droit. Il a ainsi commis une faute, même si le testateur qui voulait déshériter son épouse n’avait pas manifesté la volonté de priver celle-ci de ce droit viager. Or, le frère du défunt, auquel il appartient de démontrer qu’ainsi informé, le testateur aurait souhaité faire perdre à son épouse son droit d’usage et d’habitation viager, ne rapporte pas cette preuve. En effet, les attestations produites ne font pas état de la volonté du défunt que son épouse quitte le domicile conjugal. Le testateur a établi son testament afin de protéger ses enfants en bas âge, volonté corroborée par les dispositions prises dans cet acte. La privation du droit d’usage et d’habitation de leur mère aurait eu pour conséquence de remettre en question leurs conditions de vie et aurait nui à leur protection. Le frère du défunt ne rapporte donc pas la preuve que la faute du notaire lui a causé un préjudice.

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