LIQUIDATION JUDICIAIRE : Le juge-commissaire peut autoriser le liquidateur à vendre l’immeuble – indivis et situé à l’étranger – du débiteur (Cass. com., 29 mai 2019, n° 18-14.844, P+B)

LIQUIDATION JUDICIAIRE : Le juge-commissaire peut autoriser le liquidateur à vendre l’immeuble – indivis et situé à l’étranger – du débiteur (Cass. com., 29 mai 2019, n° 18-14.844, P+B)

N’excède pas ses pouvoirs le juge-commissaire qui autorise, au titre des opérations d’une liquidation judiciaire ouverte en France, la vente d’un immeuble du débiteur situé sur le territoire d’un État étranger sans vérifier au préalable que la liquidation puisse produire ses effets dans cet État. En outre, l’autorisation donnée au liquidateur n’a eu pour objet, en l’espèce, que de permettre à ce dernier de représenter le débiteur pour la vente d’un immeuble ordonnée par un autre juge dans le cadre du partage d’une indivision.

Il résulte du premier paragraphe de l’article L. 641-9 du code de commerce, non modifié par l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, que le liquidateur a seul qualité, tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée, pour procéder à la réalisation de l’ensemble des biens du débiteur, même si ceux-ci ont été acquis postérieurement au prononcé de la liquidation et quelle que soit leur situation géographique.
 
Cession de l’immeuble dépendant d’une succession ouverte après le prononcé de la procédure collective
 
Dans la présente affaire, M. X… avait été mis en liquidation judiciaire le 15 février 1994 ; à la suite du décès de son père le 16 mai 1995, un immeuble en situation d’indivision, sis en Espagne, était entré dans son actif. Le partage de l’indivision entre les héritiers avait été ordonné le 30 novembre 2007. Le tribunal de grande instance ayant donné mandat à un notaire de faire vendre à l’amiable cet immeuble, le liquidateur avait demandé au juge-commissaire de l’autoriser à signer l’acte projeté au nom et pour le compte de M. X…, dessaisi. Par ordonnance du 8 décembre 2015, le juge-commissaire avait fait droit à cette demande. Soutenant que le juge-commissaire avait excédé ses pouvoirs en autorisant la cession d’un immeuble situé hors du territoire français, M. X… avait relevé appel de cette ordonnance.
 
Confirmant l’ordonnance, la cour d’appel a autorisé le liquidateur à consentir, au nom et pour le compte du débiteur, à la vente de gré à gré de l’immeuble situé en territoire espagnol au prix de 1 000 000 euros (prix offert supérieur aux précédentes évaluations du bien par expertise) ; pour les juges du fond, c’est à juste titre que le liquidateur a rappelé la portée universelle de la procédure collective et le principe d’unicité du patrimoine des débiteurs selon lequel tous les actifs peuvent être réalisés par le liquidateur judiciaire afin d’apurer le passif déclaré : il importait donc peu que l’immeuble soit situé à l’étranger et que les droits du débiteur aient été acquis  dans le cadre d’une succession ouverte postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire ; de plus, le liquidateur n’avait pas à obtenir l’accord préalable du débiteur – exigé par le paragraphe IV de l’article L. 641-9 du code de commerce, introduit par  l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, inapplicable au litige.
 
Autorisation du juge-commissaire non entachée d’excès de pouvoir
 
M. X…, reprochant à l’arrêt d’appel de ne pas avoir recherché si la procédure de liquidation ouverte à son encontre en France avait été acceptée ou reconnue par l’ordre juridique espagnol, s’est pourvu en cassation.
 
Rejetant le pourvoi, la Haute juridiction énonce :
 
— que « non seulement le juge-commissaire n’excède pas ses pouvoirs en se bornant à autoriser, au titre des opérations d’une liquidation judiciaire ouverte en France, la vente d’un immeuble du débiteur situé sur le territoire d’un État étranger sans vérifier au préalable que la liquidation puisse produire ses effets dans cet État., dont la réaction quant à la possibilité d’une réalisation effective de la vente n’a pas à être anticipée »,
 
— mais que, en outre, « l’autorisation litigieuse, à la supposer nécessaire, n’a eu pour objet, en l’espèce, que de permettre au liquidateur de M. X… de le représenter pour la vente d’un immeuble ordonnée par un autre juge dans le cadre du partage d’une indivision, et non comme opération de liquidation judiciaire ».

https://www.christian-finalteri-avocat.fr/avocat-bastia/cabinet-avocat-actualites/droit-affaires-et-societes.html