VEFA : RECEPTION TACITE

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VEFA : RECEPTION TACITE

Cour d’appel de Rennes, 4e chambre, 18 février 2021, RG n° 18/05587

La SCI les Belles Vues d’Erquy demande de constater la réception tacite de l’ouvrage au 12 janvier ou au 10 mai 2012, dates respectives de l’établissement d’un constat d’huissier qui a relevé les malfaçons présentées par les travaux et de l’assignation en référé expertise, qui manifestent selon elle une volonté de prendre possession de l’ouvrage, le lot gros oeuvre étant alors soldé, ce qui entraîne une présomption de réception tacite.

La société Socotec, la société AXA en qualité d’assureur de la société S2I, la société SMA assureur de la société B. Constructions et la société Socotec demandent la confirmation du jugement qui a écarté une réception tacite. Elles font valoir qu’aux dates évoquées par le maître d’ouvrage n’est établie aucune volonté dépourvue d’équivoque de ce dernier de recevoir les ouvrages de gros ‘uvre, mais au contraire que les démarches de la SCI à ces dates manifestent une dénonciation des désordres présentés par ces travaux.

Ceci étant, en application de l’article 1792-6 du Code civil, la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est en tout état de cause prononcée contradictoirement.’

Il est constant qu’une réception tacite peut être admise, dès lors qu’est caractérisée une volonté non équivoque du maître de l’ouvrage d’accepter les travaux, peu important que l’ouvrage soit inachevé ou ne soit pas en état d’être réceptionné’; ainsi la prise de possession de l’ouvrage accompagnée du paiement des travaux est de nature à faire présumer cette volonté.

Toutefois, en l’espèce, le premier juge a justement caractérisé l’absence de réception tacite. En effet, il est établi par les pièces produites et rappelé par l’expert, que les travaux de gros oeuvre et de charpente de la société B. Construction ont été achevés en août 2010, que la société D2I à plusieurs reprises a sollicité la SCI pour obtenir, dès avant la mise en liquidation de cette société intervenue fin 2011, l’organisation d’une réception, notamment par divers courriers de décembre 2010, janvier et février 2011, lesquels n’ont pas été suivis d’effet. Au contraire, par courrier du 5 mai 2011, la SCI a relevé, sur la base du rapport final de la société Socotec, l’existence de nombreux désordres et demandé à la société D2I d’organiser les réparations par les entreprises, position maintenue dans les courriers suivants. Le constat d’huissier du 12 janvier 2012, établi à la demande du maître d’ouvrage, précise que l’entreprise liquidée n’interviendra plus sur l’immeuble et établit une liste des désordres et points litigieux. Il ne caractérise pas de volonté claire et univoque de la SCI de prendre possession de ces ouvrages. Au contraire, ce constat a été suivi d’un courrier de la SCI du 13 mars 2012 dans lequel elle refuse expressément de procéder à une réception partielle et souhaite une réception définitive à l’achèvement complet de la construction.

S’agissant de la date du 10 mai 2012, elle correspond à l’assignation en référé expertise dans laquelle la SCI indique que la société D2I a pris prétexte de son refus d’une réception partielle pour repousser l’exécution du second oeuvre, précisant qu’elle n’était pas tenue d’accepter une telle réception. Cette assignation qui n’est pas adressée à la société B. Construction et à ses représentants mais uniquement à la société D2I fonde la demande d’expertise sur l’inertie et le comportement de cette société et sur l’existence de désordres du gros oeuvre interdisant la poursuite du chantier, sans que puisse en être déduite une volonté non équivoque d’accepter les travaux.

En outre, la société SMA relève à juste titre qu’une réception tacite serait intervenue avec réserves relatives aux désordres connus affectant le gros oeuvre, sauf à priver le maître d’ouvrage de tout recours à raison d’une purge des malfaçons apparentes ; qu’une telle réception aurait exclu en tout état de cause pour ces désordres la mise en oeuvre de la responsabilité décennale des locateurs d’ouvrage. En conséquence, le jugement qui a écarté l’existence d’une réception tacite de l’ouvrage de gros oeuvre par la SCI les Belles Vues d’Erquy est confirmé.

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