SECRET DE L’INSTRUCTION ET DE L’ENQUETE : Lancement d’une délicate mission d’information à l’Assemblée nationale (Assemblée nationale, mission d’information, Secret de l’enquête et de l’instruction, 2018-2019)

SECRET DE L’INSTRUCTION ET DE L’ENQUETE : Lancement d’une délicate mission d’information à l’Assemblée nationale (Assemblée nationale, mission d’information, Secret de l’enquête et de l’instruction, 2018-2019)

L’article 11 du Code de procédure pénale encadrant le secret de l’enquête et de l’instruction pose en pratique un certain nombre de difficultés.

Le secret de l’enquête et de l’instruction vise à protéger une enquête en cours. Mais ce principe pose quelques difficultés : faut-il s’exprimer ? Si oui, qui ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?

Bref rappel de ce que prévoit la loi

C’est l’article 11 du Code de procédure pénale qui encadre le principe du secret de l’instruction et de l’enquête. Il dispose que « sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du Code pénal ». Cet article renvoie au délit de violation du secret professionnel prévu par l’article 226-13 du Code pénal, puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

La pratique s’éloignant de plus en plus du principe du secret, une loi de 2000 (L. n° 2000-516, 15 juin 2000) est venue ajouter l’alinéa suivant : « Toutefois, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause ». Aujourd’hui, le procureur de la République peut donc, par exception, communiquer de manière objective sur une enquête en cours. Cet alinéa reste pourtant sujet à interprétation.

De la nécessité de revoir l’équilibre entre information et protection

Pour Didier Paris, député, co-rapporteur de cette mission d’information, « l’article 11 du Code de procédure pénale pose aujourd’hui trois difficultés : l’article est assez rigide, et paradoxalement, plus il l’est moins il est respecté ; il tient peu compte d’éléments récents comme la jurisprudence de la CEDH qui offre une certaine place à l’intérêt public de l’information ; et il fait référence à de nombreuses dispositions comme le secret professionnel ou la loi de la presse qu’il faut prendre en compte (sans qu’il s’agisse d’une entrée en matière pour modifier cette loi de 1881) ».

En réalité, une certaine confusion règne entre les règles élémentaires du secret d’instruction (quelles informations protéger ? Dans quel but ? Par quel moyen ? etc.) et les dérogations qui pourraient être accordées. « Personne n’est favorable à la suppression du secret, prend soin de préciser Didier Paris, mais la question qui se pose est comment mieux équilibrer information et protection ».

Faut-il prévoir des fenêtres de tirs de communication (pendant l’enquête ou l’instruction) ?

Peut-il y avoir une prise de parole d’office, sur demande ou de manière obligatoire du parquet ?

Ce dernier est-il le seul à pouvoir s’exprimer ?

Parmi les questions posées aux personnes auditionnées : comment ce secret s’est-il construit ?

Comment ces professionnels ressentent le cadre juridique actuel ?

Quelles améliorations souhaitent-ils proposer ?

Au programme des auditions

« C’est un sujet au croisement de plusieurs domaines qui mérite de voir assez large » explique Didier Paris. Une cinquantaine d’auditions sont donc prévues, des professionnels de justice, aux journalistes en passant par le monde associatif.

Celles-ci ont commencé le 4 juillet avec Haritini Mastopoulou, professeure de droit et Clara Bouglé-Le Roux, maître de conférences. Le 10 juillet, c’était au tour de Vincent Chamoillaux et Lucille Rouet du Syndicat de la magistrature. Le responsable du pôle enquêtes de Mediapart, Fabrice Arfi, a également été auditionné.

Le 11 juillet, ont été auditionnés : Stéphanie Ausbart, Anne de Pingon, Flavien Noailles, membres du bureau national d’Unité magistrats ; Alexandre de Bosschere, vice-président de la Conférence nationale des procureurs de la République, procureur d’Amiens ; Jean-Baptiste Bladier, procureur de Senlis ; Éric Corbaux, procureur de Pontoise et Achille Kiriakides, procureur d’Aix-en-Provence.

Et cette semaine, c’est au tour des avocats Vincent Pénard (représentant du Conseil national des barreaux et de la Conférence nationale des bâtonniers) et Basile Ader (représentant du barreau de Paris) d’être entendus. Et côté force de sécurité :

  • du général de division Jean-Philippe Lecouffe, sous-directeur de la police judiciaire ;
  • du capitaine Martin Millet, membre du bureau de la police judiciaire à la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) ;
  • et de Nicolas Lerner, directeur général de la sécurité intérieure (DGSI).

 Texte intégral ici : http://www2.assemblee-nationale.fr/15/commissions-permanentes/commission-des-lois/missions-d-information/secret-de-l-enquete-et-de-l-instruction/(block)/59708

https://www.christian-finalteri-avocat.fr/cabinet-avocat-competences/droit-penal/