RESPONSABILITE DE L’ASSUREUR EN RESPONSABILITE DECENNALE : Cause du dommage et notion d’élément d’équipement (Cass. 3e civ., 13 févr. 2020, n° 19-10249)

Le contrat de réservation en VEFA

RESPONSABILITE DE L’ASSUREUR EN RESPONSABILITE DECENNALE : Cause du dommage et notion d’élément d’équipement (Cass. 3e civ., 13 févr. 2020, n° 19-10249)

Des particuliers concluent un contrat de maison individuelle avec un maître d’œuvre. Une assurance dommages-ouvrage est souscrite auprès de la société Aviva et le maître d’œuvre délivre aux acquéreurs une garantie de livraison obtenue auprès de la société GGI.

Lorsque des difficultés surviennent en cours de chantier, le maître d’œuvre obtient la désignation d’un expert puis est mis en liquidation judiciaire. Les acquéreurs déclarent le sinistre à la société Aviva le 17 novembre 2008 et, en cours d’expertise, la CGI conclut avec eux une transaction prévoyant le versement d’une somme globale et forfaitaire en indemnisation du préjudice subi du fait de l’arrêt du chantier, s’ajoutant à la somme déjà réglée au titre des pénalités de retard, ainsi que sa subrogation dans les droits des maîtres de l’ouvrage à l’égard de l’assureur dommages-ouvrage.

Aux termes de l’article L. 114-1 du Code des assurances, toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance.

Selon l’article L. 242-1 du même code, l’assurance dommages-ouvrage prend effet, avant la réception, après mise en demeure restée infructueuse, le contrat de louage d’ouvrage conclu avec l’entrepreneur étant résilié pour inexécution, par celui-ci, de ses obligations.

Si, pour les désordres apparus après réception, il est jugé que le point de départ du délai biennal est le jour où le maître de l’ouvrage a eu connaissance des désordres (Cass. 1re civ., 4 mai 1999, n° 97-13198), il en va différemment pour les désordres survenus avant réception, dès lors que c’est seulement lorsque, après mise en demeure, l’entreprise n’exécute pas ses obligations et que le contrat est résilié que la garantie de l’assureur dommages-ouvrage peut être recherchée pour les désordres de nature décennale.

La formalité de la mise en demeure n’étant pas requise quand elle se révèle impossible ou inutile, notamment en cas de cessation de l’activité de l’entreprise (Cass. 1re civ., 23 juin 1998, n° 95-19340) ou de liquidation judiciaire emportant résiliation du contrat de louage d’ouvrage (Cass. 1re civ., 3 mars 1998, n° 95-10293), c’est cette circonstance qui constitue l’événement donnant naissance à l’action, au sens de l’article L. 114-1 du code des assurances, et, partant, le point de départ du délai de la prescription biennale.

Pour déclarer prescrite la demande de la CGI, subrogée dans les droits des acquéreurs, contre l’assureur dommages-ouvrage, l’arrêt retient que les maîtres de l’ouvrage avaient connaissance des désordres le 22 septembre 2006 et que, pour obtenir la garantie avant réception de l’assureur dommages-ouvrage, ils étaient tenus de mettre l’entreprise en demeure d’exécuter ses obligations et, faute par celle-ci de le faire, de résilier son contrat dans le délai de deux ans à compter de cette date, les acquéreurs, qui ont régularisé leur déclaration de sinistre auprès de l’assureur dommages-ouvrage le 17 novembre 2008, plus de deux ans après la connaissance des désordres, sans l’avoir mise en demeure d’exécuter ses obligations ni résilier son marché, étaient prescrits en leur action, que le placement en liquidation judiciaire de l’entreprise le 24 juin 2008 permettait aux maîtres de l’ouvrage d’agir en garantie dommages-ouvrage avant réception sans mise en demeure infructueuse et résiliation du marché de l’entrepreneur, mais sans leur donner un nouveau délai de deux ans pour ce faire, et que l’assureur subrogé dans les droits et actions des acquéreurs, ne dispose pas de plus de droits que les maîtres de l’ouvrage de sorte que sa demande est prescrite.

En statuant ainsi, alors qu’elle constate que la résiliation du contrat n’était intervenue que le 24 juin 2008, date de l’ouverture de la liquidation judiciaire de l’entreprise, la cour d’appel, qui fixe le point de départ du délai de deux ans à une date antérieure à celle de l’événement donnant naissance à l’action, viole les textes susvisés.