RESIDENCE DE L’ENFANT AU REGARD DU DROIT INTERNATIONAL ET EUROPEEN: RECHERCHE DE L’INTERET SUPERIEUR

AFFAIRES FAMILIALES : Contribution aux charges

RESIDENCE DE L’ENFANT AU REGARD DU DROIT INTERNATIONAL ET EUROPEEN: RECHERCHE DE L’INTERET SUPERIEUR

Cass. 1re civ., 12 juin 2020, n° 19-24108

Au sens des articles 3 et 4 de la Convention de La Haye du 5 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants, 2, 11), et 11, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale, est illicite tout déplacement ou non-retour d’un enfant fait en violation d’un droit de garde exercé effectivement et attribué à une personne par le droit ou le juge de l’État dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle avant son déplacement ou son non-retour.

Il résulte de la jurisprudence constante de la CJUE, en premier lieu, que la résidence habituelle de l’enfant, au sens du règlement n° 2201/2003, correspond au lieu où se situe, dans les faits, le centre de sa vie et il appartient la juridiction nationale de déterminer où se situe ce centre sur la base d’un faisceau d’éléments de fait concordants.

Qu’en deuxième lieu, la résidence habituelle doit être interprétée au regard des objectifs de ce règlement, notamment celui selon lequel les règles de compétence qu’il établit sont conçues en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant et, en particulier, du critère de proximité.

Qu’en troisième lieu, lorsque l’enfant est un nourrisson, son environnement est essentiellement familial, déterminé par la personne ou les personnes de référence avec lesquelles il vit, qui le gardent effectivement et prennent soin de lui, et il partage nécessairement l’environnement social et familial de cette personne ou de ces personnes. En conséquence, lorsque, comme dans la présente espèce, un nourrisson est effectivement gardé par sa mère, dans un État membre différent de celui où réside habituellement le père, il convient de prendre en compte notamment, d’une part, la durée, la régularité, les conditions et les raisons du séjour de celle-ci sur le territoire du premier État membre, d’autre part, les origines géographiques et familiales de la mère ainsi que les rapports familiaux et sociaux entretenus par celle-ci et l’enfant dans le même État membre.

Qu’en quatrième lieu, lorsque dans les mêmes circonstances, un nourrisson est effectivement gardé par sa mère, l’intention initialement exprimée par les parents quant au retour de celle-ci accompagnée de l’enfant dans un autre État membre, qui était celui de leur résidence habituelle avant la naissance de l’enfant, ne saurait être à elle seule décisive pour déterminer la résidence habituelle de l’enfant, au sens du règlement, cette intention ne constituant qu’un indice de nature compléter un faisceau d’autres éléments concordants. Cette intention initiale ne saurait être la considération prépondérante, en application d’une règle générale et abstraite selon laquelle la résidence habituelle d’un nourrisson serait nécessairement celle de ses parents. De même, le consentement ou l’absence de consentement du père, dans l’exercice de son droit de garde, à ce que l’enfant s’établisse en un lieu ne saurait être une considération décisive pour déterminer la résidence habituelle de cet enfant, au sens du règlement.

En l’espèce, pour fixer la résidence habituelle de l’enfant en Grèce, l’arrêt de la cour d’appel de Colmar retient que, s’agissant d’un nourrisson, il est nécessaire de prendre en considération la résidence du couple et l’intention commune des parents, et qu’en cas de séjours temporaires l’étranger, un changement de résidence ne peut être pris en considération qu’en cas d’intention ferme, formulée par les deux parents, d’abandonner leur résidence habituelle afin d’en acquérir une nouvelle, peu important le lieu où l’enfant a passé le plus de temps depuis sa naissance. Il relève que les parents se sont mariés en Grèce où ils résident régulièrement depuis quatre ans et où le père exerce principalement son activité professionnelle, la mère ayant mis fin son activité professionnelle pour s’installer en Grèce avec son époux. Il constate que l’enfant est de nationalité grecque et est né en Grèce où il a vécu pendant quatre semaines, le logement ayant été aménagé pour sa naissance, qu’il dispose d’un passeport grec, d’une mutuelle et est enregistré auprès de l’assurance maladie grecque. Il relève encore que les deux parents ont indiqué une adresse commune en Grèce lors de l’établissement de l’acte de naissance de leur fils et que la résidence de la famille est enregistrée auprès de la mairie du Pirée. Il en déduit que la résidence habituelle des parents et, subséquemment, celle de l’enfant est établie en Grèce et que, si le déplacement de l’enfant en France ne présente aucun caractère illicite, les deux parents étant venus ensemble, d’un commun accord, avec l’enfant sur le territoire national, la mère ne pouvait décider de modifier unilatéralement la résidence habituelle de l’enfant sans l’accord du père et s’opposer son retour.

Ainsi, la cour d’appel prive sa décision de base légale en ne recherchant pas, comme il le lui incombe, si, au regard du très jeune âge de l’enfant et de la circonstance qu’il est arrivé à l’âge d’un mois en France et y a séjourné de manière ininterrompue depuis lors avec sa mère, son environnement social et familial et, par suite, le centre de sa vie, ne s’y trouve pas, nonobstant l’intention initiale des parents quant au retour de la mère, accompagnée de l’enfant, en Grèce après son séjour en France.

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