RECEL SUCCESSORAL : Quand le notaire le découvre (Cour d’appel de Nancy, Chambre civile 1, 5 novembre 2018, RG N° 17/01608, inédit)

L'effet déclaratif du partage

RECEL SUCCESSORAL : Quand le notaire le découvre (Cour d’appel de Nancy, Chambre civile 1, 5 novembre 2018, RG N° 17/01608, inédit)

L’article 778 du Code civil prévoit en son premier alinéa que l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession est réputé accepter purement et simplement la succession sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés.

Ce même texte précise en son deuxième alinéa que lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

Par ailleurs, selon l’art. 843 du même code, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement : il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.

Ainsi, sauf dispense expresse de rapport, les dons manuels sont présumés rapportables.

En l’espèce, le représentant du Crédit Agricole a, sur la demande que lui adressait le notaire, indiqué à celui-ci, le 13 juin 2014, que le défunt, c’est-à-dire M. Germain V, ne possédait plus de titres au porteur << PREDICIS >> à son décès, ces titres ayant fait l’objet d’un paiement par virement de la somme de 17’806,41 euro sur le compte de M. Christian V, le 14 novembre 2005, et de la somme de 8’034,48 euro sur le compte de M. Germain V, le 24 novembre 2005.

Il résulte de ces éléments que M. Germain V a donné de la main à la main un certain nombre de titres au porteur dont son fils Christian s’est fait remettre la contrepartie en argent. La preuve n’étant pas rapportée que ce don manuel ait été fait expressément avec dispense de rapport, M. Christian V était donc tenu d’en rapporter la valeur à la succession de son père.

Or, ainsi que l’a relevé le tribunal, lorsque le notaire de la succession a, le 13 mars 2014, réuni les héritiers de M. Germain V en vue de parvenir à un accord sur le partage de sa succession, et abordé le chapitre des donations, M. Christian V, qui était présent, s’est abstenu de révéler l’existence des avantages qu’il avait reçus du défunt, et n’en a admis la réalité que lorque le notaire en a eu connaissance par l’établissement bancaire. Le tribunal a considéré à juste titre que l’abstention dont M. Christian V avait fait preuve le 13 mars 2014, attitude qu’il avait maintenue jusqu’à la découverte par le notaire de l’existence de titres au porteur ayant appartenu au défunt, était constitutive d’une dissimulation intentionnelle, et révélatrice d’une intention frauduleuse qui devait être qualifiée de recel au sens de l’art. 778 du Code civil.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a dit que M. Christian V ne pourrait prétendre à aucun droit sur la somme de 17’806,41 euro correspondant à la valeur des titres au porteur par lui recelés.

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