PROCEDURE CONTRADICTOIRE EN MATIERE D’IMPOSITIONS INDIRECTES : Respect des droits de la défense (Cass. com., 18 mars 2020, n° 17-20.596, P+B)

Action paulienne du fisc

PROCEDURE CONTRADICTOIRE EN MATIERE D’IMPOSITIONS INDIRECTES : Respect des droits de la défense (Cass. com., 18 mars 2020, n° 17-20.596, P+B)

Les destinataires de décisions affectant de manière sensible leurs intérêts doivent pouvoir faire connaître utilement leur point de vue concernant les éléments sur lesquels l’administration entend fonder sa décision.

Tel est le principe réaffirmé par la chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 18 mars 2020.

Une société, entrepositaire agréé, procède à l’expédition de boissons alcoolisées à destination d’entreprises situées, notamment, dans des États membres de l’Union européenne. Lors de la réception des marchandises, les destinataires émettent un document d’apurement.

Au terme d’une enquête, l’administration des douanes retient que les sociétés destinataires étaient fictives ou bien n’avaient jamais reçu lesdites marchandises. L’entrepositaire agréé se voit notifier un procès-verbal d’infractions puis un avis de mise en recouvrement (AMR) qu’il conteste.

Cette contestation étant rejetée par l’administration, la société mise en cause décide d’assigner l’administration des douanes aux fins d’obtenir l’annulation du procès-verbal d’infractions, de l’AMR et de la décision de rejet de sa contestation.

Déboutée par les juges du fond, la société forme un pourvoi en cassation. Se fondant sur l’article L. 80 M du Livre des procédures fiscales, elle estime qu’en  « refusant d’annuler le procès-verbal de notification d’infraction et l’AMR litigieux, après avoir constaté que l’intégralité des éléments sur lesquels se fondait l’avis préalable de taxation n’avait été transmise au redevable qu’après l’établissement du procès-verbal et de l’avis de mise en recouvrement, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le principe et le texte susvisés ».

La Haute juridiction donne raison à cette société.

L’occasion pour elle de revenir sur l’article L. 80 M du Livre des procédures fiscales. Celui-ci prévoit qu’en matière de contributions indirectes et de réglementations assimilées, toute constatation susceptible de conduire à une taxation donne lieu à un échange contradictoire entre le contribuable et l’administration.

La chambre commerciale ajoute que le principe du respect des droits de la défense implique que les destinataires de décisions affectant de « manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue quant aux éléments sur lesquels l’administration entend fonder sa décision ».

Au cas particulier, la requérante avait demandé communication des pièces de la procédure le 11 juin 2013. Des pièces finalement communiquées le 23 octobre 2013 par l’administration, soit postérieurement à l’établissement du procès-verbal d’infractions et à l’émission de l’avis de mise en recouvrement.

Jugeant qu’il n’avait pas été porté atteinte aux droits de la défense de la société requérante au motif que la précision du procès-verbal d’infractions lui permettait de faire valoir utilement ses observations, la cour d’appel avait déclaré régulière cette procédure.

Un raisonnement censuré par la Haute juridiction : « en statuant ainsi, alors que, faute d’avoir eu connaissance des documents sur lesquels l’administration entendait fonder sa décision, la société Care n’avait pas pu faire valoir utilement ses observations avant que celle-ci n’établisse le procès-verbal d’infractions, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le principe et le texte susvisés (respect des droits de la défense et l’article L. 80 M du Livre des procédures fiscales) ».

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