PROCEDURE CIVILE : MODIFICATION DU POINT DE DÉPART DE LA PRESCRIPTION DE L’ACTION EN PAIEMENT ET CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME

PROCEDURE CIVILE : Prescription

PROCEDURE CIVILE : MODIFICATION DU POINT DE DÉPART DE LA PRESCRIPTION DE L’ACTION EN PAIEMENT ET CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME

PROCEDURE CIVILE : Prescription

Exposé des faits et de la procédure :

Aux termes de l’article L. 218-2 du Code de la consommation, l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

Selon l’article 2224 du Code civil, le délai de prescription court à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

S’il a été jugé que :

  • le point de départ du délai biennal de prescription se situait, conformément à l’article 2224 du Code civil, au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action concernée,
  • il a été spécifiquement retenu, comme point de départ, dans le cas d’une action en paiement de travaux formée contre un consommateur, le jour de l’établissement de la facture. (Cass. 1re civ., 3 juin 2015, n° 14-10908).

Cour de cassation (PROCEDURE CIVILE : Prescription) :

Motivation :

Cependant, la Cour de cassation retient désormais que l’action en paiement de factures formée contre un professionnel, soumise à la prescription quinquennale de l’article L. 110-4 du Code de commerce, se prescrit à compter de la connaissance par le créancier des faits lui permettant d’agir, pouvant être fixée à la date de l’achèvement des prestations (Cass. com., 26 févr. 2020, n° 18-25036).

Afin d’harmoniser le point de départ des délais de prescription des actions en paiement de travaux et services, il y a donc lieu de prendre en compte la date de la connaissance des faits qui permet au professionnel d’exercer son action, laquelle peut être caractérisée par l’achèvement des travaux ou l’exécution des prestations.

Pour déclarer irrecevable, comme prescrite, l’action en paiement formée par l’entrepreneur, la cour d’appel de Poitiers retient que la facture a été établie près de sept mois après l’exécution de la prestation en méconnaissance des délais d’établissement impartis par les articles L. 441-3 du Code de commerce et 289 du Code général des impôts, que sa date n’est pas certaine et que le délai de prescription a commencé à courir à la date à laquelle la facture aurait au plus tard dû être émise.

Au vu de la jurisprudence relative à la fixation du point de départ du délai de prescription de l’action en paiement de travaux formée contre un consommateur à la date d’établissement de la facture, la prescription de l’action de l’entrepreneur serait susceptible d’être écartée, tandis que la modification de ce point de départ pourrait conduire à admettre la prescription au regard des constatations de la cour d’appel relatives à la date d’exécution de la prestation.

Solution retenue (PROCEDURE CIVILE : Prescription) :

Néanmoins :

La jurisprudence nouvelle s’applique de plein droit à tout ce qui été fait sur la base de la jurisprudence ancienne.

Il en va différemment si l’application du principe affecte irrémédiablement la situation des parties ayant agi de bonne foi.

L’application de la jurisprudence nouvelle à la présente instance aboutirait à priver l’entrepreneur, qui n’a pu raisonnablement anticiper une modification de la jurisprudence, d’un procès équitable au sens de l’article 6 § 1, de la Conv. EDH, en lui interdisant l’accès au juge, de sorte qu’il est justifié de faire exception au principe de cette application immédiate, en prenant en compte la date d’établissement de la facture comme constituant le point de départ de la prescription au jour de l’assignation et la cour d’appel, qui fait abstraction de la date d’établissement de la facture qu’il lui incombait, le cas échéant, de déterminer, viole les textes susvisés.

Cass. 1re civ., 19 mai 2021, n° 20-12520