Police « tous risques chantier » : de la qualité d’assuré (Civ. 3ème, 22 oct. 2014, FS-P+B, n°13-24.834)

Compromis de vente : rétractation par courriel

Police « tous risques chantier » : de la qualité d’assuré (Civ. 3ème, 22 oct. 2014, FS-P+B, n°13-24.834)

Lorsque les conditions particulières d’une police « tous risques chantier » précisent que seul le maître de l’ouvrage a la qualité d’assuré, les autres intervenants à l’opération de construction ne sont pas couverts.

D’emblée, cette décision de la troisième chambre civile, rendue le 22 octobre 2014, apparaît énoncer une vérité simple : en somme, si les conditions particulières de la police « tous risques chantier » (TRC) précisaient que seul le maître de l’ouvrage avait la qualité d’assuré, les autres intervenants au chantier ne sont pas couverts par l’assurance. Ainsi, peuvent-ils donc être condamnés à couvrir le maître de l’ouvrage et son assureur, étant donné qu’ils ne sont pas directement concernés.

Cette lapalissade mérite cependant d’être explicitée, afin de comprendre pour quelles raisons la Cour de cassation a été amenée a se prononcer ainsi. L’assurance « tous risques chantiers » est assez fréquente en pratique (V. P. Malinvaud [dir.], Droit de la construction, Dalloz Action, 2013, no 114.110). Elle est souscrite le plus souvent par un promoteur ou par le maître d’ouvrage, au profit de l’ensemble des intervenants, et c’est sans doute pour cette raison que le titulaire du lot plomberie, en l’espèce, s’estimait couvert.

En l’espèce, le maître de l’ouvrage, une société civile immobilière (SCI) ayant fait édifier deux bâtiments vendus en état futur d’achèvement, avait souscrit une police de ce type. Un dégât des eaux était intervenu, et le syndicat des copropriétaires avait assigné l’ensemble des intervenants à l’opération de construction ainsi que leurs assureurs. La société chargée du lot plomberie avait décidé de contester sa condamnation à garantir le maître de l’ouvrage et son assureur, prétextant de ce qu’elle était couverte, conformément à la pratique habituelle, par la police TRC qu’avait souscrite le premier. C’est ce qu’avait tenté de faire valoir le moyen, considérant que l’assurance tous risques chantiers est une assurance de dommages pour le compte de tous les participants à l’opération de construction. Étant couvert par l’assurance, il n’avait évidemment pas à garantir l’assureur.

La Cour de cassation approuve la cour d’appel, se reportant aux conditions particulières de la police. Selon elle, seul le maître de l’ouvrage avait la qualité d’assuré. Aussi, la société titulaire du lot plomberie n’était pas couverte.

Ce n’est pas la première fois que l’on comprend, à la lumière de la jurisprudence de la Cour de cassation, qu’en matière de police TRC, on se situe dans le « tout contractuel », à tout le moins dans un domaine où la volonté des parties est non seulement entièrement libre mais doit être également respectée. Ce type de police n’est régi par aucune clause type et il en existe autant de variétés que de souscripteurs (V. RDI 2006. 433, obs. P. Dessuet ). Ainsi, au visa de l’article 1134 du code civil, la Cour de cassation avait-elle déjà eu l’occasion de préciser que « la police TRC, assurance de dommages pour le compte de tous les participants à l’opération de construction, est une assurance facultative qui n’a pour objet et exclusions que ce qu’en décident les parties » (V. Civ. 3e, 13 sept. 2006, n° 05-10.125, RDI 2006. 433, préc. ; ibid. 470, obs. B. Boubli ). Certes, dans cette décision, la Cour avait paru livrer une définition de la police TRC, retenant son caractère collectif, ce à partir de quoi le rédacteur du pourvoi avait pu se sentir autorisé de rédiger un moyen en ce sens. Mais elle rappelait aussi l’évidente possibilité de prévoir des aménagements contractuels. Et, précisément, en l’espèce, les parties avaient décidé qu’il n’y aurait qu’un assuré : le maître de l’ouvrage.