Nullité du contrat de vente-installation de panneaux photovoltaïques et nullité du contrat de crédit affecté

FAMILLE : Contrat de mariage

Nullité du contrat de vente-installation de panneaux photovoltaïques et nullité du contrat de crédit affecté

Cour d’appel de Rennes, 2ème chambre, 5 juin 2020, RG n° 16/09677

Sur la nullité du contrat principal :

Aux termes de l’article L. 121-23 du Code de la consommation dans sa rédaction en vigueur lors de la conclusion du contrat litigieux, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’un démarchage au domicile d’une personne physique doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :

• le nom du fournisseur et du démarcheur,

• la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés,

• les conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services,

• le prix global à payer, les modalités de paiement et, en cas de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur ce type de vente,

• la faculté de renonciation ouverte au client ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26.

En l’espèce, aucun délai de livraison et d’exécution des travaux d’installation n’est mentionné dans le bon de commande laissé en possession de l’acquéreur qui, seul, justifie de la réalité des mentions portées à leur connaissance par le démarcheur lors de la conclusion du contrat. Cette irrégularité a pour effet d’entraîner à elle seule la nullité du contrat.

L’appelante soutient qu’il s’agit d’une nullité relative et qu’en l’espèce, l’acheteur a renoncé à l’invoquer dans la mesure où il n’a pas usé de sa faculté de rétractation, a accepté la livraison du matériel et l’exécution des travaux, signé l’attestation de fin de travaux et mis en service l’installation, manifestant ainsi sa volonté de confirmer l’acte irrégulier.

Cependant, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.

Or, en l’espèce, aucun acte ne révèle que, postérieurement à la conclusion du contrat, M. Y a eu connaissance de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation. La signature de l’attestation de fin de travaux portant ordre de libération des fonds ne suffit pas à caractériser qu’il a, en pleine connaissance de l’irrégularité du bon de commande, entendu renoncer à la nullité du contrat en résultant, et qu’il aurait de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document. Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et, sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres motifs de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat conclu entre M. Y et la société Sunlite.

M. Y a régularisé une déclaration de créance auprès du mandataire liquidateur de la société Sunlite pour les préjudices découlant de l’installation des panneaux. Les conclusions du rapport d’expertise pointent en effet, que les désordres constatés, à savoir des fuites en toiture affectant une partie du plafond de la maison, sont dus à une mauvaise exécution des travaux d’installation des panneaux et rendent l’ouvrage impropre à sa destination car la fonction couvert n’est plus assurée.

C’est par une juste estimation des préjudices subis que le premier juge a alloué en réparation à M. Y la somme de 4’510 EUR au titre des frais de remise en état, d’embellissement et réfection des peintures, la somme de 889,38 EUR au titre du bâchage de la couverture, la somme de 2’000 EUR au titre du préjudice de jouissance et assorti les deux premières sommes de l’indexation sur l’indice BT 01 du coût de la construction à compter du dépôt du rapport d’expertise jusqu’à la décision à intervenir. Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a fixé la créance de M. Y à l’égard de la société Sunlite en liquidation judiciaire à hauteur des sommes allouées. Mais la société Sunlite, placée en liquidation judiciaire le 12 septembre 2014, ne peut être condamnée au paiement de ces sommes. Il convient d’infirmer le jugement déféré sur ce point.

Sur la nullité du contrat de crédit :

Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du Code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la banque Solfea est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société Sunlite emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu par M. Y avec la société banque Solfea.

La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte que celle-ci doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre.

A cet égard, la BNP sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a retenu une faute à l’encontre de la société Banque Solfea et rejeté sa demande en restitution du capital emprunté.

Elle soutient que M. Y, en signant l’attestation de fin de travaux, a confirmé l’exécution du contrat principal ainsi que sa conformité au bon de commande et a sollicité sans réserve le déblocage des fonds au profit de la société Sunlite. Elle expose que le raccordement au réseau public de transport et de distribution d’électricité n’était pas prévu au contrat principal et n’était donc pas financé à crédit. Elle considère donc que l’attestation de fin de travaux étant dénuée d’équivoque et aucune disposition n’imposant au prêteur de vérifier la conformité du bon de commande, la Banque Solféa n’avait pas à procéder à de plus amples vérifications avant de verser les fonds entre les mains du fournisseur.

M. Y conclut à la confirmation de la disposition du jugement attaqué l’ayant dispensé de restituer le capital prêté. Il fait valoir que le prêteur a commis une faute en se dessaisissant des fonds en faveur de la société Sunlite au vu d’un bon de commande irrégulier et sans s’assurer de la bonne exécution du contrat alors que celui-ci mettait à la charge du fournisseur la réalisation des travaux de raccordement au réseau et les démarches administratives. Il fait valoir que la mention manuscrite portée sur le bon de commande que le contrat serait nul et caduc en cas de refus administratif, technique et financier, témoigne que la délivrance des autorisations administratives et le raccordement au réseau étaient des conditions essentielles du contrat.

Il est de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société Sunlite , par l’intermédiaire de laquelle la société Solfea faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès de M. Y qu’il entendait confirmer l’acte irrégulier.

La BNP fait valoir que si une copie du bon de commande lui a été transmise, il n’est pas exclu que les préposés de la société Sunlite aient rempli a posteriori les cases manquantes, de telle sorte que l’attention de la banque ne soit pas attirée sur les éventuelles irrégularités.

Cependant, la copie du bon de commande produite par la banque est strictement identique à la copie du bon de commande versée aux débats par M. Y, de sorte que la banque échoue à rapporter la preuve d’une quelconque modification ultérieure du contrat.

Au surplus, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds alors que l’attestation de livraison ne lui permet pas de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.

Sur ce dernier point, il convient de relever que l’attestation de fin de travaux dont la banque se prévaut pour justifier le versement des fonds entre les mains du fournisseur présentait un caractère pour le moins équivoque et contradictoire dans la mesure où, si son signataire attestait que les travaux « objets du financement’ ne couvraient pas ‘le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles », le bon de commande établi par la société Sunlite Technologies comportait une case « pack administratif et installation (raccordement ERDF assuré jusqu’à 500 EUR) » qui avait été cochée. Il existait donc à tout le moins une contradiction entre les deux documents qui devait conduire la Banque Solféa à ne pas libérer les fonds entre les mains du vendeur, au seul vu de cette attestation pré-imprimée, sans procéder à des vérifications complémentaires sur l’exactitude de ses énonciations présentant des incohérences relativement à l’exécution complète du contrat principal ainsi que sur la volonté des emprunteurs de faire procéder au versement des fonds directement entre les mains du fournisseur.

En outre, le prêteur, spécialiste du financement de systèmes individuels de production d’énergie renouvelable, n’ignorait pas que l’opération avait pour objet de revendre l’électricité produite à EDF grâce au raccordement de l’installation au réseau d’ERDF, le bon de commande au vu duquel elle a consenti son concours mentionnant d’ailleurs que la prestation du fournisseur incluait un ‘pack administratif’ et l’installation tout en précisant que le raccordement au réseau était assuré jusqu’à 500 EUR.

Si la Banque Solféa n’avait certes pas à assister l’emprunteur lors de la conclusion et de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande et de l’attestation de fin de travaux avant de se dessaisir du capital prêté. En versant les fonds entre les mains du fournisseur, au seul vu de cette attestation dont les mentions étaient ambiguës, et sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle et l’exécution complète du contrat principal, la société Solfea aux droits de laquelle vient la BNP, a commis une faute la privant du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.

Cette mesure constitue en effet la réparation exacte du préjudice subi par M. Y lequel réside dans l’annulation du contrat de prêt en dehors de toute faute de sa part et, au surplus, sans perspective d’obtenir la restitution du prix par le fournisseur en liquidation judiciaire et sans pouvoir assurément conserver en contrepartie une installation fournissant les performances attendues.

Le jugement entrepris est donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de la banque en restitution du capital emprunté et condamné cette dernière à rembourser à M. Y les échéances du prêt qu’il a payées.

https://www.christian-finalteri-avocat.fr/actualites/droit-de-la-responsabilite-et-des-contrats/