MANDAT D’ARRET EUROPEEN : Respect des droits de l’homme (Cass. crim., 26 mars 2019, n° 19-81731)

MANDAT D’ARRET EUROPEEN : Respect des droits de l’homme (Cass. crim., 26 mars 2019, n° 19-81731)

Une personne, qui a fait l’objet d’un mandat d’arrêt européen délivré par les autorités judiciaires slovènes le 16 février 2018 pour des faits de fraude commis en 2004 et 2005 ne consent pas à sa remise.

La chambre de l’instruction, pour écarter l’argumentation tirée du non-respect de ce texte, énonce que ce texte concerne l’hypothèse où le mandat d’arrêt européen est émis pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privative de liberté, alors que le mandat a été émis pour l’exercice de poursuites pénales, dès lors que, malgré certaines mentions ambiguës du mandat, elle considère exactement que celui-ci a été émis pour l’exercice de poursuites pénales sans méconnaître les dispositions de l’article 695-22-1 du Code de procédure pénale.

La chambre de l’instruction, pour écarter le moyen tiré du risque d’atteinte à la vie privée et familiale de la personne réclamée, après avoir rappelé qu’il ne peut y avoir d’ingérence d’une autorité publique dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale d’une personne que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la défense de l’ordre, à la prévention des infractions pénales et à la protection des droits et libertés d’autrui, énonce notamment que, si la personne réclamée dispose de solides attaches familiales en France, les agissements pour lesquels il est poursuivi sont de ceux qui troublent gravement l’ordre public d’un État de droit, par l’insécurité qu’ils génèrent sur un plan économique et ajoute que, si une mesure de mandat d’arrêt européen est susceptible de porter atteinte au respect de la vie privée et familiale, cette atteinte trouve sa justification dans la nature même de la procédure du mandat d’arrêt européen, qui est de permettre, dans le principe de confiance mutuelle des États membres de l’Union européenne comme dans l’intérêt de l’ordre public et sous les conditions fixées par les dispositions qui la régissent, notamment, l’exécution de poursuites pénales. En statuant ainsi, elle ne méconnaît pas les dispositions de la Conv. EDH, puisqu’elle en déduit la proportionnalité de l’ingérence au but légitime recherché.

De même, la chambre de l’instruction elle ne méconnaît pas la Conv. EDH lorqu’elle écarte le moyen tiré de la violation du délai raisonnable et du principe du contradictoire, en énonçant que ledit moyen concerne l’exécution d’une peine suite à une condamnation et doit être rejeté s’agissant de poursuites pénales, dès lors qu’elle n’a pas à apprécier la durée prétendument excessive, au regard de l’article 6 § 1 de la Convention, de la procédure pénale diligentée en Slovénie, sans incidence sur la validité de la procédure de mandat d’arrêt européen.

Mais il se déduit de la combinaison des articles 3 et 13 de la Conv. EDH, 4, 47 et 52 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et 695-33 du Code de procédure pénale que, lorsque les informations contenues dans le mandat d’arrêt sont insuffisantes pour permettre à la chambre de l’instruction de statuer sur la remise de la personne recherchée dans le respect de ses droits fondamentaux, cette juridiction est tenue de les solliciter auprès des autorités de l’État d’émission.

La chambre de l’instruction qui, pour écarter les moyens de la personne réclamée tirés du risque de violation de ses droits fondamentaux en raison notamment des conditions de détention dans les prisons slovènes, énonce que l’intéressé n’est pas demandé pour l’exécution d’une peine et qu’il n’est pas démontré qu’il serait susceptible de subir dans les prisons de Slovénie des traitements inhumains et dégradants, sans analyser les éléments produits par la personne réclamée, tirés d’arrêts de la CEDH et de documents établis par les organes du Conseil de l’Europe, qui font état d’un risque réel de traitement inhumain ou dégradant des personnes détenues dans l’État membre d’émission en raison des conditions générales de détention, et de carences des mécanismes de contrôle desdites conditions, afin d’évaluer si ces informations, objectives et fiables, sont précises et dûment actualisées, et si elle doit, le cas échéant, solliciter des informations supplémentaires des autorités de l’État d’émission ne justifie pas sa décision.

Texte intégral de l’arrêt ici : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_criminelle_578/757_26_41897.html

https://www.christian-finalteri-avocat.fr/avocat-bastia/cabinet-avocat-actualites/droit-penal.html