INVESTISSEMENT FINANCIER : LE DEVOIR DE CONSEIL ET D’INFORMATION DU CONSEILLER

IMMOBILIER : Dépôt de garantie

INVESTISSEMENT FINANCIER : LE DEVOIR DE CONSEIL ET D’INFORMATION DU CONSEILLER

Cour d’appel de Toulouse, 2e chambre, 20 janvier 2021, RG n° 18/02025

Le service de conseil en investissement est constitué par le fait de fournir des recommandations personnalisées à un tiers, soit à sa demande, soit à l’initiative de l’entreprise qui fournit le conseil, concernant une ou plusieurs transactions portant notamment sur des instruments financiers.

Le conseiller en investissement financier est ainsi tenu à l’égard de son client d’un devoir d’information et de conseil.

S’il n’est pas garant du résultat de l’opération et ne supporte aucune obligation de suivi une fois l’investissement réalisé, sa responsabilité est néanmoins susceptible d’être engagée au motif qu’il n’aurait pas pleinement satisfait à son devoir d’information et deconseil. Il appartient alors à celui qui recherche sa responsabilité de démontrer l’existence d’un lien causal entre ce manquement et le préjudice subi.

Les époux N. établissent l’existence de manquements de M. S. à ses obligations d’information et de conseil.

Il ressort du courriel envoyé par M. N. à M. S. le 10 mars 2013 et de la lettre de mission signée le 27 mai 2013 que les époux N. n’ont pas été démarchés par M. S. mais qu’ils lui ont confié pour mission de les assister dans un placement financier avec pour objectif de valoriser leur capital. Rien ne permet d’affirmer, comme le fait M. S., qu’ils avaient pour objectif d’investir dans les produits ARF Trust proposés par Alter-Management dès lors que le premier mail envoyé par M. N. se limite à lui demander des renseignements sur ‘les fonds de fonds à rendement garanti ainsi que sur les fonds de fonds optimal’ sans citer particulièrement ARF Trust.

L’attestation de mise en relation, signée par M. N. le 11 juin 2013, soit le même jour que la souscription des fonds ARF Trust, selon laquelle il reconnaît avoir recherché et trouvé de sa propre initiative des informations sur ce fonds, sans avoir été démarché, et être demandeur de ce produit financier qu’il sait Off-shore pour être situé au Canada et non agréé par l’Autorité des marchés financiers (Amf) ne décharge pas M. S. de ses propres obligations.

Dès lors que les époux N. ont fait le choix, suivant lettre de mission signée antérieurement, soit le 27 mai 2013 de se rapprocher d’un conseiller en investissement financier afin d’être renseignés sur ces produits mais plus largement assistés dans un placement financier afin de valoriser leur capital, tel qu’indiqué dans la mission confiée à M. S., ce dernier se devait de réaliser des vérifications et de leur proposer des recommandations personnalisées tenant compte de leur profil et de leur demande mais également de les avertir des risques liés aux produits sur lesquels ils souhaitaient obtenir des informations.

M. S. a ainsi commis une faute en leur préconisant un placement non agréé par l’Amf alors qu’ils avaient expressément indiqué être des clients non professionnels, tous deux étant fonctionnaires pour exercer pour l’un dans le service des ressources humaines de l’Isae et pour l’autre en qualité d’enseignant et ne disposant pour seul placement que d’une assurance-vie, et avoir une aversion limitée aux risques, ce qui s’est confirmé par leur choix d’investir au moins 50% de leur capital sur un fonds dit ‘protégé’.

Il apparaît ainsi dans le compte rendu de mission établi, sur lequel aucune date n’est visible, que M. S. leur a conseillé d’investir, en premier lieu dans les produits ARF, en second choix auprès d’Aristophil (investissement sur des lettres et manuscrits anciens)et en dernier lieu auprès de Fairvesta (immobilier allemand acheté décoté). La seule mention ‘fonds de fonds canadien, en gestion alternative, non agréée AMF’ au titre des produits ARF ne suffit pas à établir que M. S. a satisait à ses obligations de mise en garde et de conseil.

Les seules informations qu’il leur a délivrées, par le biais de plaquettes informatives versées aux débats, n’étaient pas davantage de nature à les éclairer sur les risques liés à ces produits financiers. Ces plaquettes, assez succintes sur les éléments d’informationrelatifs aux fonds de placement proposés, se contentent d’indiquer que le compartiment à taux garanti de 5 ans ‘permet de générer un gain garanti de 35% au terme de cinq ans’ par le recours à de nombreux spécialistes reconnus sans autres détails ou précisions puis font état d’une ‘performance absolue de 7 à 9% par an’, pour le compartiment ‘protégé’. Elles ne présentent des éléments chiffrés qu’au titre de ce compartiment ‘protégé’ et du compartiment ‘optimum 2013″ alors que le bulletin de souscription présente quatre compartiments différents (ARF court terme dynamique, Capital et rendement garantis, Capital protégé et Optimum) et que les époux N. ont souscrit les compartiments Capital et rendement garantis et Capital protégé à hauteur de moitié de leur investissement pour chacun.

M. S. s’est, par ailleurs, abstenu de toute vérification quant au sérieux de ces produits proposés et de l’entité Alter-Management alors qu’il présentait la société Alter Management LLC comme l’un de ses principaux partenaires sur la fiche d’informationslégales remise à M. N. le 27 mars 2013 et que l’absence d’agrément par l’Amf et le profil de ses clients imposaient une vigilance accrue de sa part.

Le rendement de ces placements ne peut pas être utilement invoqué par M. S. comme un objectif atteint pour les époux N. dès lors que leur réalité n’est pas établie. Le jugement ayant retenu des manquements de M. S. dans l’exécution de sa mission est donc confirmé.

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