Garantie des vices cachés : conditions de mise en jeu (Cour d’appel de Rouen, 1re chambre civile, 11 mars 2020, RG n° 17/0414) Avocat à Bastia

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Garantie des vices cachés : conditions de mise en jeu (Cour d’appel de Rouen, 1re chambre civile, 11 mars 2020, RG n° 17/0414) Avocat à Bastia

Aux termes de l’art. 1641 du Code civil« le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ».

Aux termes de l’art. 1643 du Code civil« il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie« .

Ainsi que l’a estimé le tribunal de grande instance d’Evreux, il ressort des débats, et notamment du rapport d’expertise, que le bien immobilier objet du présent litige était, au moment de sa vente aux époux B., affecté d’un vice inhérent, dès lors que le bois des colombages de la façade nord était pourri à 70 % et que la sole de la façade sud l’était totalement.

Messieurs M. et LE N., sapiteurs, ont, en page 7 de leur rapport déposé au mois d’avril 2010, préconisé un étayage immédiat des linteaux, estimant que les ‘dégradations fongiques majeures’ portaient ‘atteinte à la solidité de l’ouvrage’.

Le vice engendre donc un risque d’effondrement, ce qui caractérise une diminution de l’usage de la maison tel que les acquéreurs ne l’auraient pas achetée ou en auraient donné un moindre prix s’ils l’avaient connu.

Le pourrissement généralisé du bois de structure était en effet caché aux acquéreurs puisque, à dire d’expert, la mise en peinture réalisée sur les colombages rendait ce vice « indécelable pour un non-initié ».

Or, il n’est pas contesté que les époux B. n’avaient aucune compétence particulière en matière de travaux du bâtiment.

Dès lors que l’acte de vente contient une clause élusive de la garantie des vices cachés, il revient toutefois aux époux B. de démontrer la connaissance du vice par Madame LE C. et par la même sa mauvaise foi.

A cette fin, ils se prévalent de l’attestation dressée le 16 janvier 2019 par monsieur Philippe M. dans laquelle ce dernier soutient avoir averti Madame LE C., avant d’intervenir au cours de l’année 2003, qu’il y avait « beaucoup de bois à changer’ et que ‘la peinture ne pourrait pas tenir« .

Madame LE C., acquéreur, conteste quant à elle avoir été avertie du pourrissement des bois.

C’est par des motifs propres que le tribunal a retenu que cette pièce, établie par une partie au litige dont la responsabilité est recherchée, ne suffisait pas à établir que la venderesse avait une connaissance suffisante de l’ampleur du vice pour justifier sa condamnation sur le fondement du vice caché.

La cour relève en outre qu’il n’est pas établi que le caractère endémique de l’attaque fongique aurait été explicité à madame LE C., pas davantage que ses conséquences potentielles sur la solidité de la structure et l’usage de la maison, monsieur M. indiquant simplement avoir attiré son attention sur des difficultés d’accroche’de la peinture.

Il y a lieu de relever, en outre, que les travaux confiés à monsieur M. comprenaient, à dire d’expert, une dimension de reprise partielle des supports, consistant notamment à les colmater avec de la mousse polyuréthanne. Ainsi que l’indique l’expert en page 15 et 32 de son rapport, madame LE C. a donc « fait diligence », en faisant réaliser des travaux de reprise ‘ »effectifs bien qu’insuffisants ».

En tant que non-professionnelle du bâtiment, elle a pu considérer ces travaux comme satisfactoires, et ce d’autant plus que les problèmes d’accroche initiaux ne se sont pas reproduits entre 2005 et 2008. Le fait que les travaux aient été réalisés 6 et 3 ans avant la vente contribue du reste à infirmer l’hypothèse d’une intention malicieuse à l’égard des futurs acquéreurs.

La décision est donc confirmée en ce que les demandes formées à l’encontre de Madame LE C. ont été rejetées.