GARANTIE DECENNALE : L’aire de stationnement qualifiée d’ouvrage immobilier (Cour d’appel de Colmar, Chambre civile 2, section A, 11 janvier 2018, RG n° 16/02972)

Annulation de la vente pour vices cachés

GARANTIE DECENNALE : L’aire de stationnement qualifiée d’ouvrage immobilier (Cour d’appel de Colmar, Chambre civile 2, section A, 11 janvier 2018, RG n° 16/02972)

Dans le cadre d’un projet de rénovation d’un immeuble, sis Pôle Européen d’Affaires à Colmar, la société GL s’est vue confier le lot 1 ‘voirie/espaces verts’, le lot 2 ‘eaux pluviales-assainissement’ et le lot 3 ‘basse tension-éclairage public-télécommunication-télédistribution-gaz ‘, selon acte d’engagement du 30 août 2007.

La SCI Alcide de Gasperi et la SCI Jean Monnet sont propriétaires d’un immeuble à vocation professionnelle et commerciale dans ce centre d’affaires.

Les travaux réalisés par la société GL ont fait l’objet d’une réception, sans réserve, le 31 décembre 2009.

Le 8 août 2011, la SCI Alcide de Gasperi s’est plainte de désordres affectant le lot 1, ‘voirie et espaces verts’ et a signalé un décollement anormal, en plusieurs endroits, du nidagravel, revêtement alvéolaire assurant la répartition et le maintien des gravillons, mis en place sur l’aire de stationnement.

La SCI Alcide de Gasperi et la SCI Jean Monnet ont assigné la société GL, aux fins de la voir condamner à réparer le préjudice subi du fait des désordres.

L’aire de stationnement de l’immeuble à vocation professionnelle et commerciale, lequel appartient au maître de l’ouvrage, situé dans un centre d’affaires, doit être qualifiée d’ouvrage immobilier au sens de l’art. 1792 du Code civil, compte tenu de son ancrage au sol, de l’ampleur des travaux et de sa fonction de viabilisation du terrain. Le constructeur soutient à tort que cette aire serait un élément d’équipement de l’ouvrage ayant pour fonction exclusive de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage au sens de l’art. 1792-7 du Code civil, dans la mesure elle a pour fonction propre le stationnement de véhicules pour permettre l’accès au bâtiment.

L’absence de réserve lors de la réception de l’aire de stationnement ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de la garantie décennale. En effet, si l’expertise enseigne que la différence de granulométrie du revêtement de l’aire de stationnement était décelable par un examen visuel, le comportement du produit et les conséquences dommageables ne pouvaient pas être décelés à la réception. Il en est d’autant plus ainsi que les affaissements en certains endroits des places de stationnement et le décollement du revêtement sont apparus postérieurement à la réception par l’usage habituel des lieux.

Le maître d’ouvrage peut invoquer la garantie décennale de l’entrepreneur chargé de la réalisation d’une aire de stationnement permettant l’accès à son immeuble à usage professionnel. En effet, l’expertise, réalisée 4 ans après la fin des travaux, révèle des dégradations d’aspect peu acceptable générant un inconfort en raison de la formation d’ornières. Si ces désordres sont plus ou moins marqués par endroit, ils doivent être considérés comme généralisés, en ce qu’ils rendent l’accès au bâtiment dangereux et non conforme à la destination d’une aire de stationnement desservant un immeuble. L’expertise précise aussi que ces désordres sont évolutifs, de sorte qu’il est acquis que dans le délai décennal, le parking sera inutilisable et dangereux. Le défaut d’entretien, au demeurant non démontré, est sans influence sur les désordres, ce qui exclut tout partage de responsabilité. L’entrepreneur doit donc être condamné à hauteur du coût des travaux de réfection à l’identique du parking.

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