Faut-il payer une indemnité pour l’occupation d’un immeuble indivis délabré ?

VIAGER : Résolution judiciaire

Faut-il payer une indemnité pour l’occupation d’un immeuble indivis délabré ?

Cour d’appel de Montpellier, 3e chambre civile, 22 mai 2020, RG n° 15/0337

Mme D qui ne conteste pas occupé ce bâtiment A depuis le décès de son père, estime ne pas devoir être redevable d’une indemnité d’occupation au regard de l’état délabré de l’immeuble, indécent et inhabitable. La réformation du jugement qui a entériné l’estimation de l’expert de 771 € par mois s’impose au regard du constat du 30 octobre 2018.

Les intimés co-indivisaires concluent à la confirmation de la décision déférée, Mme D étant responsable des dégradations et du défaut d’entretien de l’immeuble. Le rapport d’expertise n’est selon eux pas contestable et d’ailleurs n’a pas été contesté en temps et heures.

A dire d’expert judiciaire qui l’a visitée et évaluée le 15 janvier 2010, le bâtiment A occupé par Mme H D depuis le […] est une maison de plain-pied construite en 1959 comprenant 4 pièces principales pour une superficie utile de 70,3 m² avec une véranda de 9,8m² et une terrasse de 89,7m². L’expert indique clairement que la maison dont la charpente est en bon état et dont la façade, écaillée par endroit, ne présente aucune fissure inquiétante, est sans isolation, les menuiseries extérieures sont d’origine en bois avec simple vitrage, la véranda de 1961 n’est pas isolée, la porte d’entrée est hors d’usage, des traces d’humidité sont visibles sur le haut des murs en raison du manque de ventilation, la maison est chauffée par deux poêles à bois et à gaz sans ventilation, la plomberie est fatiguée, le chauffe-eau au gaz n’est pas aux normes de sécurité et électricité est totalement hors normes. L’immeuble comporte un garage de 30 m² au portail rouillé et une remise basse en juxtaposition de clapiers de 22 m².

L’expert a estimé la valeur à une valeur moyenne de 219 000€ ou de 244 000 €, suivant que l’on intègre ou non la remise à la vieille maison et l’indemnité d’occupation à 4 % de cette valeur vénale, soit 730 € par mois ou 813 € par mois suivant la solution adoptée pour la remise. Le tribunal a fixé une valeur médiane de 771 € mensuels à compter du […] jusqu’à libération des lieux .

L’expert judiciaire a parfaitement pris en considération toutes les caractéristiques de cet immeuble vétuste et non rénové.

A ce jour- et les pièces communiquées aux débats par Mme D en attestent, le loyer d’une maison de moins de 90 m² sur Pérols est en moyenne de 763 € avec un maximum de 800 €. Le montant retenu par le tribunal de 771 € mensuel correspond donc au loyer d’une villa de 80 m², superficie de la véranda incluse, avec terrain autour, en bon état de location à Pérols. Or tel n’est pas le cas de cette maison qui n’est pas conforme aux normes de sécurité et fait partie des 5 % de maisons en France qui à ce jour ne comportent ni chauffage central, ni chauffage électrique. Le mode de chauffage, les ouvertures à simple vitrage et l’absence de ventilation favorisent l’apparition d’humidité qui ne peut être reprochée à la l’occupante. Il n’est certes pas prétendu ni à plus forte raison établi que depuis 15 années qu’elle occupe les lieux, Mme D ait effectué quelques travaux que ce soit dans les lieux ni n’ait surtout sollicité les membres de l’indivision à cette fin. L’indemnité d’occupation sera fixée à 600 € par mois à compter du […] jusqu’à libération des lieux et rapportée à l’actif de l’indivision par Mme H D.

S’agissant de l’occupation par A K du bâtiment B du chef de son épouse antérieurement à leur divorce, il convient de constater que si les intimés sont totalement silencieux dans leurs conclusions sur ce chef de demande, leur conseil, Me R S, a au cours de la procédure dans ses dires adressés à l’expert T U, plus particulièrement les 25 juin 2007 et 3 juillet 2008 déclaré que A K est redevable d’une indemnité d’occupation depuis le décès de son père jusqu’à ce que son épouse quitte les lieux, suivant notification faite aux autres indivisaires le 3 juillet 2008.

M. A K sera donc redevable à l’indivision d’une indemnité d’occupation pour la période courant du […] au 3 juillet 2008, fin de la jouissance privative. L’expert judiciaire rapporte que cette maison de plain-pied construite de façon traditionnelle en 1977 avec isolation rapportée et vide sanitaire, comprend 4 pièces principales pour une superficie utile de 121, 4 m² avc garage de 29,9 m² et terrasse de 42,8 m². Sa charpente et sa couverture sont saines. La façade n’est pas totalement peinte et présente quelques fissures horizontales et au niveau du joint de dilatation. Le chauffage et la production d’eau chaude sont assurés par une chaudière au fuel en bon état et les radiateurs en fonte-aluminium sont proportionnés. Les sanitaires sont obsolètes et l’électricité est à revoir, l’installation étant hors service. Cette installation fonctionnait du temps de l’occupation par Mme Z-AC K née E et donc à son entrée dans les lieux. Le procès-verbal dressé le 7 mars 2017 traduit un mauvais état de la propriété et défaut d’entretien généralisé.

L’expert a estimé la valeur de cette propriété en fourchette basse sur 797 m² entre 350 000 € et 366 000 € et en fourchette haute sur 884 m². Au regard de l’ensemble de ces éléments l’indemnité d’occupation sera fixée à la somme de 1 100 € par mois du […] au 3 juillet 2008  avant la crise financière) et rapportée à l’actif par M. A K.

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