DOMMAGE CORPOREL : CRITERES D’APPRECIATION DU PREJUDICE D’ETABLISSEMENT (DECES PREMATURE)

DOMMAGE CORPOREL : CRITERES D’APPRECIATION DU PREJUDICE D’ETABLISSEMENT (DECES PREMATURE)

Cass, Civ 1, 17 février 2021, n°19-21.622 et n°19-23.604

La première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° V 19-21.622 et n° Z 19-23.604 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon l’arrêt attaqué (Pau, 20 mars 2019), L… J…, née le […] , a présenté une grave infirmité, à la suite de fautes commises, lors de l’accouchement de sa mère, par P… Q…, sage-femme, M. T…, gynécologue-obstétricien, et la société Clinique Les Cigognes, lesquels, par un arrêt devenu définitif, ont été condamnés in solidum à réparer l’intégralité des préjudices en résultant et à contribuer respectivement à cette réparation à hauteur de 30 % pour P… Q…, 10 % pour M. T… et 60 % pour la société Clinique Les Cigognes, aux droits de laquelle se trouve la société Polyclinique de Navarre. L… J… est décédée le […].

3. Mme S… J…, sa mère, M. C… J…, son père, ainsi que Mme I… R… , Mme B… J…, M. A… J…, M. H… O… J…, Mme O… F… , prise tant en son nom personnel qu’en sa qualité d’ayant droit de Y… J…, Mme O… J…, (les consorts J…) ont, en leur nom personnel et en qualité d’ayants droit de L… J…, assigné en liquidation de leurs préjudices P… Q… et son assureur, Le Sou médical aux droits duquel se trouve la société Mutuelle assurances corps santé français (MACSF), M. T… et son assureur, la société Allianz IARD, et la société Polyclinique de Navarre. La société La Médicale de France est intervenue à l’instance en qualité d’assureur de la société Polyclinique de Navarre. La Mutualité sociale agricole Sud Aquitaine est intervenue à l’instance aux fins d’obtenir le remboursement de ses débours. Mme B… Q… est intervenue en cause d’appel, en qualité d’ayant droit de P… Q…, décédée le […].

Examen des moyens

Sur les moyens du pourvoi principal n° V 19-21.622 et des pourvois incidents, pris en leurs deux premières branches, et les deux premiers moyens du pourvoi n° Z 19-23.604, ci-après annexés

4. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur les moyens du pourvoi principal n° V 19-21.622 et des pourvois incidents, pris en leur troisième branche, rédigés en termes identiques, réunis

Enoncé du moyen

5. La société Polyclinique de Navarre et la société La Médicale de France, Mme B… Q… et la société MACSF, et M. T… et la société Allianz IARD font grief à l’arrêt de les condamner in solidum à payer la somme de 12 307,69 euros au titre du préjudice d’établissement subie par la victime directe, alors « que les dommages-intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu’il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu’en retenant, pour allouer une somme de 12 307,69 euros aux ayants cause de L… J… au titre du préjudice d’établissement subi par cette dernière, que ce préjudice, correspondant à la perte d’espoir et de chance de réaliser normalement un projet de vie familiale, devait être évalué en prenant en compte la somme qu’elle aurait perçue si elle n’était pas décédée prématurément, rapportée au nombre d’années qu’elle avait effectivement vécues à compter de la consolidation de son état jusqu’à son décès (soit entre l’âge de 12 et de 22 ans), sans rechercher si L… J… aurait été susceptible de s’établir à la date où son état s’était consolidé, soit à l’âge de 12 ans, si elle n’avait pas été atteinte d’un grave handicap permanent, et si, en conséquence, c’était bien à cet âge que son handicap lui avait fait perdre l’espoir et la chance de réaliser un projet de vie familiale jusqu’à son décès, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de réparation intégrale. »

Réponse de la Cour

Vu le principe d’une réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

6. Pour allouer une somme de 12 307,69 euros aux ayants cause de L… J… au titre du préjudice d’établissement subi par cette dernière, l’arrêt retient que ce préjudice, correspondant à la perte d’espoir et de chance de réaliser normalement un projet de vie familiale, doit être évalué en prenant en compte la somme qu’elle aurait perçue si elle n’était pas décédée prématurément, rapportée au nombre d’années qu’elle a effectivement vécues à compter de la consolidation de son état jusqu’à son décès, soit entre l’âge de 12 et de 22 ans.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui incombait, la date à compter de laquelle la victime aurait pu réaliser un projet de vie familiale si elle n’avait pas été atteinte de son handicap, afin d’être en mesure d’apprécier l’existence et, le cas échéant, l’étendue de ce préjudice jusqu’à son décès, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard du principe susvisé.

Sur le troisième moyen du pourvoi n° Z 19-23.604

Enoncé du moyen

8. Les consorts J… font grief à l’arrêt de fixer à la somme de 100 000 euros l’indemnisation due au titre du déficit fonctionnel permanent de la victime, alors « qu’après avoir énoncé que le préjudice de déficit fonctionnel permanent de la victime devait être évalué 102 277 euros, la cour d’appel ne pouvait, sauf à méconnaître le principe de la réparation intégrale du préjudice, « arrondir » ce préjudice à la somme de 100 000 euros ; qu’en statuant comme elle l’a fait, elle a méconnu le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit. »

Réponse de la Cour

Vu le principe d’une réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

9. Pour évaluer l’indemnisation du déficit fonctionnel permanent, après avoir repris le taux de déficit fonctionnel fixé par l’expert à 95 %, estimé le prix du point à 7 000 euros, réduit l’indemnité prorata temporis à hauteur de 15,38 % compte tenu du décès de la victime dix ans après la consolidation, et constaté que ce calcul donnait un résultat de 102 277 euros, l’arrêt retient que cette somme doit être arrondie à 100 000 euros.

10. En statuant ainsi, alors qu’elle avait évalué le préjudice à la somme de 102 277 euros, la cour d’appel a méconnu le principe susvisé.

Et sur le quatrième moyen du pourvoi n° Z 19-23.604

Enoncé du moyen

11. Les consorts J… font grief à l’arrêt de réserver les indemnisations à allouer du chef de certains préjudices, et de rouvrir les débats en considération des versements à connaître du montant de la prestation de compensation du handicap (PCH) que les consorts J… ont pu recevoir pour la période postérieure au 12 février 2005, alors « que la prestation de compensation du handicap n’entre pas dans la catégorie des prestations ouvrant droit à action contre la personne tenue à réparation du dommage ou son assureur mentionnées aux articles 29 et 32 de la loi du 5 juillet 1985 ; qu’en conséquence, nonobstant sa qualification indemnitaire, elle ne peut pas être déduite des sommes dues à la victime par l’auteur du dommage et son assureur en réparation du préjudice causé ; qu’en retenant au contraire, pour l’évaluation des chefs de préjudices permanents subis par la victime, qu’il convenait de tenir compte de la prestation de compensation du handicap potentiellement perçue par cette dernière, dès lors que ladite prestation revêtait un caractère indemnitaire et qu’en l’absence d’élément précis relatif à la perception effective de cette prestation par la victime, il convenait de rouvrir les débats à cet égard, la cour d’appel a violé les articles 29 et 32 de la loi du 5 juillet 1985, l’article L. 245-1 du code de l’action sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

12. M. T… et la société Allianz IARD contestent la recevabilité du moyen. Ils soutiennent qu’il est dirigé contre un chef de dispositif de l’arrêt mixte qui ne tranche pas le principal.

13. Cependant, en ordonnant le sursis à statuer sur certains chefs de préjudice et en rouvrant les débats pour tenir compte de la PCH potentiellement perçue par la victime, la cour d’appel a implicitement mais nécessairement jugé qu’il convenait de prendre en considération cette prestation pour évaluer ces préjudices, et tranché en conséquence une partie du principal.

14. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles, et le principe d’une réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

15. Il résulte de ces textes que seules doivent être imputées sur l’indemnité réparant l’atteinte à l’intégrité physique de la victime, les prestations versées par des tiers payeurs qui ouvrent droit, au profit de ceux-ci, à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation et que, n’étant pas mentionnée par le premier de ces textes, la PCH prévue par le second, ne donne pas lieu, nonobstant sa nature indemnitaire, à recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation et ne peut donc être déduite de l’indemnisation allouée.

16. Pour réserver l’indemnisation au titre du recours à une tierce personne postérieurement au 12 février 2005, de l’incidence professionnelle, de la perte de revenus professionnels futurs et des frais de matériel médical après la consolidation et rouvrir les débats pour connaître le montant de la PCH que les consorts J… ont pu recevoir pour la période postérieure au 12 février 2005, l’arrêt retient qu’il convient de tenir compte de cette prestation pour procéder à l’évaluation de ces postes de préjudice.

17. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes et le principe susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne in solidum la succession de P… Q…, M. T… et la société Polyclinique de Navarre à payer à la succession de L… J… les sommes de 12 307,69 euros au titre du préjudice d’établissement subi par L… J…, et 100 000 euros au titre de son déficit fonctionnel permanent, en ce qu’il réserve les indemnisations à allouer au titre du recours à une tierce personne postérieurement au 12 février 2005, de l’incidence professionnelle, de la perte de revenus professionnels futurs, des frais de matériel médical exposés après la date de consolidation, en ce qu’il rouvre les débats en considération des versements à connaître du montant de la prestation de compensation du handicap que les consorts J… ont pu recevoir pour la période postérieure au 12 février 2005, et en ce qu’il demande aux parties de conclure sur la question de l’existence d’une double indemnisation possible de la victime, et sur les postes de préjudice que les prestations versées au titre de la prestation de compensation du handicap auraient réparés, l’arrêt rendu le 20 mars 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Pau ;

Remet, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Bordeaux ;

Condamne la société Polyclinique de Navarre, la société La Médicale de France, M. T…, la société Allianz IARD, Mme B… Q…, tant en son nom personnel qu’en qualité d’ayant droit de P… Q…, et la société MACSF aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société Polyclinique de Navarre, la société La Médicale de France, M. T…, la société Allianz IARD, Mme B… Q…, tant en son nom personnel qu’en qualité d’ayant droit de P… Q…, et la société MACSF et les condamne à payer aux consorts J… la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen identique produit au pourvoi principal n° V 19-21.622 par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour les sociétés La Médicale de France et Polyclinique de Navarre, et au pourvoi incident par la SCP Richard, pour la société Mutuelle assurances corps santé français et Mme Q…

Les sociétés Polyclinique de Navarre et Médicale de France font grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement entrepris dans sa disposition portant indemnisation allouée au titre du préjudice d’établissement par la victime directe (à hauteur de 12.307,69 euros), d’avoir alloué du chef du préjudice subi par la victime directe une indemnité de 785.000 euros au titre de l’assistance tierce personne avant consolidation et une indemnité de 100.000 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire et d’avoir en conséquence condamné la Polyclinique de Navarre à payer à la succession de L… J… la somme de 1.088.00 euros (à répartir entre elle, le docteur T… et la succession de P… Q… épouse G… dans les proportions fixées par l’arrêt du 6 février 2013) ;

AUX MOTIFS QUE sur le préjudice subi par la victime directe, la décision est rendue en lecture d’un rapport d’expertise judiciaire déposé le 28 janvier 2005 par le docteur V… qui n’encourt aucune critique sérieuse et qui constitue une base d’appréciation valable ; que sur l’évaluation de certains chefs de préjudice permanents subis par la victime directe décédée en cours d’instance, le jugement sera confirmé en ce qu’il décide, en raison du décès de la victime directe survenu à l’âge de 22 ans, d’une réduction proportionnelle des indemnités allouées au titre des préjudices permanents qui, si le décès n’était pas intervenu, auraient été évalués à compter de la consolidation en considération d’une espérance de vie de 65 ans à l’âge dudit décès ; que la consolidation étant considérée comme ayant été acquise 10 ans avant le décès à la date duquel l’espérance de vie était de 65 ans, c’est à bon droit qu’il limite l’indemnisation à 10/65 = 15,38% de ce qui aurait été alloué si la victime n’était pas décédée ; que I. Sur les préjudices patrimoniaux, A. Sur les préjudices patrimoniaux temporaires, (
) 4 – Sur les frais d’assistance temporaire par tierce personne avant consolidation jusqu’au 30 avril 2004, date de consolidation (infirmation du jugement), ce poste de préjudice ne fait pas l’objet de la réouverture des débats car toute cette période antérieure à la consolidation se situe en un temps où l’allocation compensatrice de tierce personne qui a pu être allouée en application de l’article 245-1 du code (de l’action) sociale dans sa rédaction alors en vigueur, ne présentait pas de caractère indemnitaire selon la jurisprudence fixée sur la base de cet ancien texte ; qu’il importe donc peu de rechercher si cette allocation a été versée pendant cette période ; que la famille a le droit à une indemnisation à ce titre ; que le tribunal a alloué une indemnité de 273.165,84 euros ; que les responsables concluent soit au rejet de la demande, soit à sa réduction, en faisant valoir qu’il conviendrait de tenir compte des services fournis par le Nid béarnais (459.495,08 euros) et qu’il conviendrait de réduire le montant de la rémunération horaire prise pour ce calcul ; que le docteur V…, qui a procédé à l’expertise de L… J… en 2004, a noté que cette assistance était nécessaire pour tous les actes ordinaires de l’existence de la vie courante et qu’elle était indispensable 24 heures sur 24 en raison du risque permanent de survenance de complications respiratoires liées à la nutrition par gavage ; que l’expertise médicale prouve donc que l’enfant handicapé a eu un besoin d’assistance permanent, soit 24 heures par jour ; que compte tenu de l’importance de ce handicap, le deux premières années n’ont pas à être exclues de ce poste d’indemnisation puisque les parents devaient être présents et assujettis aux soins exigés par leur fille dans des conditions matérielles n’ayant rien à voir avec un enfant suivant un développement normal en dehors de tout handicap ; que le motif de l’absence d’autonomie de l’enfant en bas âge ne peut donc pas être utilisé pour exclure ce poste d’indemnisation ; que néanmoins, pour la première période de référence retenue par les consorts J…, le taux horaire servant de base à l’indemnisation sera divisé par deux ; que s’agissant du taux horaire à prendre pour base, compte tenu des risques permanents de complication, la cour ne procédera pas à la distinction proposée entre surveillance passive et surveillance active mais tiendra compte de ce que la surveillance s’exerce dans un cadre familial et reste dans une certaine mesure compatible avec l’accomplissement d’activités personnelles de sorte que la rémunération de ces heures doit subir un abattement ; qu’elle retiendra, pour toute la période prise en compte (30 avril 1992 au 30 avril 2014) entre la naissance et la consolidation, une valeur moyenne de 14 euros de l’heure pour une surveillance constituant une contrainte à plein temps à raison de l’horaire réel de présence de l’enfant au domicile ; que le préjudice s’évalue donc comme suit en se fondant sur les périodes de temps prises pour base par les consorts J… étant précisé que le taux horaire moyen pris en compte est de 7 euros pour la première période et de 14 euros pour les autres :

Du
au
Jours
Semaines
Heures
Nid B
Heures
Famille
Indemnité
famille

30/04/1992
31/01/1996
1371
196
0
32.904
230.328

01/03/1996
08/01/1997
342
49
147
8.061
112.854

09/01/1997
31/12/1998
721
103
1.442
15.862
222.068

01/01/1999
30/04/2000
485
69
966
10.674
149.436

01/05/2000
30/10/2000
182
26
3.380
988
13.832

01/11/2000
30/06/2003
971
139
20.016
3.336
46.704

01/07/2003
30/04/2004
304
43
6.536
688
9.632

Total

784.854

Arrondi

785.000

que ce total sera arrondi à 785.000 euros ; (
) que II. Sur les préjudices extrapatrimoniaux, A. Sur les préjudices extrapatrimoniaux temporaires, 1 – Sur le déficit fonctionnel temporaire (réformation), le préjudice à indemniser concerne les 12 premières années de la vie de L… J… durant lesquelles son état n’était pas consolidé ; que les consorts J… sollicitent, pour ce préjudice, la somme de 216.000 euros ; que la polyclinique de Navarre et le docteur T… proposent la somme de 84.400 euros alors que l’assureur de B… Q… propose la moitié de cette somme ; que ce préjudice a vocation à indemniser les troubles subis dans les conditions d’existence ; qu’elle a été hospitalisée en service de réanimation dès sa naissance ; que dès l’âge de six mois, elle a eu recours à des séances de kinésithérapie et de psychomotricité ; qu’elle présentait des troubles de la déglutition provoquant des encombrements bronchiques par fausse route ; qu’à l’âge de trois ans, elle a été installée dans un corset en raison d’une scoliose-syphose débutante ; qu’en février 1996, elle a été prise en charge au Nid béarnais en semi-internat ; puis qu’à partir du mois de mai 2000, en internat sanitaire ; qu’en 2002, son état s’est aggravé sur le plan orthopédique ; que c’est à ce moment que les parents ont d’ailleurs envisagé la transformation de leur maison dans la perspective de l’y recueillir ; que l’expert judiciaire a retenu une incapacité temporaire totale sur l’ensemble de cette période ; que ce préjudice s’indemnisera en l’espèce sur la base forfaitaire de la moitié du SMIC puisque l’incapacité temporaire est totale ; qu’en 2004, le SMIC mensuel brut était de 1.151,20 euros, soit 575,60 euros pour la moitié de celui-ci, mais que compte tenu du temps écoulé, on peut retenir une base mensuelle de 600 euros ; que la durée du déficit temporaire qui doit être prise en compte est de 144 mois ; qu’il sera alloué la somme de 166 x 100 = 99.600 euros arrondie à 100.000 euros par réformation du jugement ; (
) que B. sur les préjudices extrapatrimoniaux permanents, (
) 5 – sur le préjudice d’établissement (confirmation), ce poste de préjudice indemnise la perte d’espoir et de chance de réaliser normalement un projet de vie familiale (perte de chance de se marier, de fonder une famille, d’élever des enfants) en raison de la gravité du handicap permanent dont est atteint la victime après sa consolidation ; que sur la base d’un préjudice d'(établissement) qui aurait été évalué, comme l’a justement fait le tribunal, à 80.000 euros pour une personne qui serait toujours vivante, c’est une indemnité de 12.307,69 euros qui sera allouée à la victime ;

ET AUX MOTIFS PARTIELLEMENT ADOPTES QU’à titre préliminaire, il y aura lieu de noter que les préjudices permanents subis par L… J…, quel que soit le caractère particulièrement lourd de ceux-ci, ne pourront être indemnisés que sur la période allant de la date de la consolidation de son état à la date de son décès ; qu’en effet, même si finalement, du fait du décès de la victime, les indemnisations en cause seront perçues par les ayants-droit de celles-ci, lesdites sommes trouvent leur justification dans des préjudices appartenant à la seule victime et ceux-ci ont donc cessé à la date de son décès ; qu’à titre d’exemple, on ne saurait en effet indemniser sur la même base deux personnes handicapées au même degré quand l’une aurait survécu un mois à son accident alors que l’autre serait restée grabataire jusqu’à un âge avancé ; que L… J… ayant survécu 10 ans à compter de la date de consolidation de son état et étant décédée à 22 ans, date à laquelle son espérance de vie était de 65 ans, les sommes devant lui revenir concernant les préjudices permanents dont elle a eu à souffrir seront calculées, prorata temporis, suivant la formule suivante : (somme due x 10 )/65 ; (
) qu’ eu égard aux pièces produites par les parties et au vu du rapport médical établi le 28 janvier 2005 par le docteur W… V…, médecin expert nommé par ordonnance du 12 janvier 2004, il y aura lieu de faire droit aux réclamations formulées par les ayants droit de L… J… au titre des préjudices subis par celle-ci pour les montants suivants :

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

(…)

Préjudices extra-patrimoniaux permanents

(…)

Préjudice d’établissement (ce poste de préjudice vise à indemniser la perte de possibilité de réaliser un projet de vie familiale normale : il s’agit de la perte d’une chance de se marier, de fonder une famille, d’élever des enfants. Quand bien même le décès de L… J… est survenu à 22 ans, le caractère certain du préjudice en cause est acquis (80.000€ x 10) / 65

12.307,69

( … ) ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer sur les demandes dont ils sont saisis sans examiner, fût-ce sommairement, les éléments de preuve invoqués les parties au soutien de leurs prétentions ; qu’en retenant, pour allouer une somme de 785.000 euros aux ayants-cause de L… J… au titre des frais d’assistance temporaire par tierce personne avant consolidation, que ce préjudice devait être évalué, pour la période où L… était prise en charge au sein de l’établissement « Le Nid béarnais », en tenant compte du temps passé par L… au domicile de ses parents tel que pris pour base par les consorts J… dans leurs écritures (soit 8.061 heures du 1er février 1996 au 8 janvier 1997, 15.862 heures du 9 janvier 1997 au 31 décembre 1998, 10.674 heures du 1er janvier 1999 au 30 avril 2000, 988 heures du 1er mai 200 au 30 octobre 2000, 3.336 heures du 1er novembre 2000 au 30 juin 2003 et 688 heures du 1er juillet 2003 au 30 avril 2004, ou un total de 36.609 heures sur l’intégralité de la période), sans même examiner, fût-ce sommairement, les conclusions du rapport d’expertise du docteur W… V… aux termes desquelles celui-ci indiquait que « le problème d’une aide au domicile [des] parents de L… ne se pose que pour les séjours qu’elle y effectue le samedi et le dimanche de 12h à 20h », qu’ « elle n’y passe pas de nuit », que « l’état justifie la présence d’une tierce personne (aide-soignante) pour aider sa mère qui s’occupe de l’enfant lorsqu’elle est au domicile parental, 1 heure chaque après-midi, les soins réguliers imposés par l’état de L… étant prodigués au Nid Béarnais » et considérait ainsi qu’une assistance n’était nécessaire que deux heures par semaine, soit environ 104 heures par an, ou 848 heures sur la période litigieuse, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu’en affirmant, pour allouer une somme de 100.000 euros aux ayants-cause de L… J… au titre du déficit fonctionnel temporaire subi par cette dernière, que ce préjudice devait être évalué sur la base d’une indemnité de 600 euros par mois et que le déficit temporaire de L… avait duré 144 mois, tout en calculant l’indemnité due en multipliant la somme de 600 euros, non par 144, mais par 166 avant d’arrondir le produit obtenu (99.600) à 100.000 euros, la cour d’appel s’est contredite sur la durée du déficit fonctionnel temporaire et a ainsi violé l’article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE les dommages et intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu’il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu’en retenant, pour allouer une somme de 12.307,69 euros aux ayants-cause de L… J… au titre du préjudice d’établissement subi par cette dernière, que ce préjudice, correspondant à la perte d’espoir et de chance de réaliser normalement un projet de vie familiale, devait être évalué en prenant en compte la somme qu’elle aurait perçue si elle n’était pas décédée prématurément, rapportée au nombre d’années qu’elle avait effectivement vécues à compter de la consolidation de son état jusqu’à son décès (soit entre l’âge de 12 et de 22 ans), sans rechercher si L… J… aurait été susceptible de s’établir à la date où son état s’était consolidé, soit à l’âge de 12 ans, si elle n’avait pas été atteinte d’un grave handicap permanent, et si, en conséquence, c’était bien à cet âge que son handicap lui avait fait perdre l’espoir et la chance de réaliser un projet de vie familiale jusqu’à son décès, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de réparation intégrale. Moyen produit au pourvoi incident n° V 19-21.622 par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour M. T… et la société Allianz IARD

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement ayant alloué aux consorts J… la somme de 12 307,69 € au titre du préjudice d’établissement résultant de la perte pour L… J… de la possibilité de réaliser un projet de vie familiale normale et, statuant à nouveau, d’avoir condamné in solidum la succession de P… G…, le docteur T… et la Polyclinique de Navarre à payer à la succession de L… la somme de 1 088 000 €.

AUX MOTIFS QUE sur le préjudice subi par la victime directe, la décision est rendue en lecture d’un rapport d’expertise judiciaire déposé le 28 janvier 2005 par le docteur V… qui n’encourt aucune critique sérieuse et qui constitue une base d’appréciation valable ; que sur l’évaluation de certains chefs de préjudice permanents subis par la victime directe décédée en cours d’instance, le jugement sera confirmé en ce qu’il décide, en raison du décès de la victime directe survenu à l’âge de 22 ans, d’une réduction proportionnelle des indemnités allouées au titre des préjudices permanents qui, si le décès n’était pas intervenu, auraient été évalués à compter de la consolidation en considération d’une espérance de vie de 65 ans à l’âge dudit décès ; que la consolidation étant considérée comme ayant été acquise 10 ans avant le décès à la date duquel l’espérance de vie était de 65 ans, c’est à bon droit qu’il limite l’indemnisation à 10/65 = 15,38% de ce qui aurait été alloué si la victime n’était pas décédée ; que I. Sur les préjudices patrimoniaux, A. Sur les préjudices patrimoniaux temporaires, (…) 4 – Sur les frais d’assistance temporaire par tierce personne avant consolidation jusqu’au 30 avril 2004, date de consolidation (infirmation du jugement), ce poste de préjudice ne fait pas l’objet de la réouverture des débats car toute cette période antérieure à la consolidation se situe en un temps où l’allocation compensatrice de tierce personne qui a pu être allouée en application de l’article 245-1 du code (de l’action) sociale dans sa rédaction alors en vigueur, ne présentait pas de caractère indemnitaire selon la jurisprudence fixée sur la base de cet ancien texte ; qu’il importe donc peu de rechercher si cette allocation a été versée pendant cette période ; que la famille a le droit à une indemnisation à ce titre ; que le tribunal a alloué une indemnité de 273.165,84 euros ; que les responsables concluent soit au rejet de la demande, soit à sa réduction, en faisant valoir qu’il conviendrait de tenir compte des services fournis par le Nid béarnais (459.495,08 euros) et qu’il conviendrait de réduire le montant de la rémunération horaire prise pour ce calcul ; que le docteur V…, qui a procédé à l’expertise de L… J… en 2004, a noté que cette assistance était nécessaire pour tous les actes ordinaires de l’existence de la vie courante et qu’elle était indispensable 24 heures sur 24 en raison du risque permanent de survenance de complications respiratoires liées à la nutrition par gavage ; que l’expertise médicale prouve donc que l’enfant handicapé a eu un besoin d’assistance permanent, soit 24 heures par jour ; que compte tenu de l’importance de ce handicap, le deux premières années n’ont pas à être exclues de ce poste d’indemnisation puisque les parents devaient être présents et assujettis aux soins exigés par leur fille dans des conditions matérielles n’ayant rien à voir avec un enfant suivant un développement normal en dehors de tout handicap ; que le motif de l’absence d’autonomie de l’enfant en bas âge ne peut donc pas être utilisé pour exclure ce poste d’indemnisation ; que néanmoins, pour la première période de référence retenue par les consorts J…, le taux horaire servant de base à l’indemnisation sera divisé par deux ; que s’agissant du taux horaire à prendre pour base, compte tenu des risques permanents de complication, la cour ne procédera pas à la distinction proposée entre surveillance passive et surveillance active mais tiendra compte de ce que la surveillance s’exerce dans un cadre familial et reste dans une certaine mesure compatible avec l’accomplissement d’activités personnelles de sorte que la rémunération de ces heures doit subir un abattement ; qu’elle retiendra, pour toute la période prise en compte (30 avril 1992 au 30 avril 2014) entre la naissance et la consolidation, une valeur moyenne de 14 euros de l’heure pour une surveillance constituant une contrainte à plein temps à raison de l’horaire réel de présence de l’enfant au domicile ; que le préjudice s’évalue donc comme suit en se fondant sur les périodes de temps prises pour base par les consorts J… étant précisé que le taux horaire moyen pris en compte est de 7 euros pour la première période et de 14 euros pour les autres :

Du
au
Jours
Semaines
Heures Nid B
Heures Famille
Indemnité famille

30/04/199
31/01/199
1371
196
0
32.904
230.328

01/02/199
08/01/199
342
49
147
8.061
112.854

09/01/199
31/12/199
721
103
1.442
15.862
222.068

01/01/199
30/04/200
485
69
966
10.674
149.436

01/05/200
30/10/200
182
26
3.380
988
13.832

01/11/200
30/06/200
971
139
20.016
3.336
46.704

01/07/200
30/04/200
304
43
6.536
688
9.632

Total

784.854

Arrondi

785.000

que ce total sera arrondi à 785.000 euros ; (…) que II. Sur les préjudices extrapatrimoniaux, A. Sur les préjudices extrapatrimoniaux temporaires, 1 – Sur le déficit fonctionnel temporaire (réformation) , le préjudice à indemniser concerne les 12 premières années de la vie de L… J… durant lesquelles son état n’était pas consolidé ; que les consorts J… sollicitent, pour ce préjudice, la somme de 216.000 euros ; que la polyclinique de Navarre et le docteur T… proposent la somme de 84.400 euros alors que l’assureur de B… Q… propose la moitié de cette somme ; que ce préjudice a vocation à indemniser les troubles subis dans les conditions d’existence ; qu’elle a été hospitalisée en service de réanimation dès sa naissance ; que dès l’âge de six mois, elle a eu recours à des séances de kinésithérapie et de psychomotricité ; qu’elle présentait des troubles de la déglutition provoquant des encombrements bronchiques par fausse route ; qu’à l’âge de trois ans, elle a été installée dans un corset en raison d’une scoliose-syphose débutante ; qu’en février 1996, elle a été prise en charge au Nid béarnais en semi-internat ; puis qu’à partir du mois de mai 2000, en internat sanitaire ; qu’en 2002, son état s’est aggravé sur le plan orthopédique ; que c’est à ce moment que les parents ont d’ailleurs envisagé la transformation de leur maison dans la perspective de l’y recueillir ; que l’expert judiciaire a retenu une incapacité temporaire totale sur l’ensemble de cette période ; que ce préjudice s’indemnisera en l’espèce sur la base forfaitaire de la moitié du SMIC puisque l’incapacité temporaire est totale ; qu’en 2004, le SMIC mensuel brut était de 1.151,20 euros, soit 575,60 euros pour la moitié de celui-ci, mais que compte tenu du temps écoulé, on peut retenir une base mensuelle de 600 euros ; que la durée du déficit temporaire qui doit être prise en compte est de 144 mois ; qu’il sera alloué la somme de 166 x 100 = 99.600 euros arrondie à 100.000 euros par réformation du jugement ; (…) que B. sur les préjudices extrapatrimoniaux permanents, (…) 5 – sur le préjudice d’établissement (confirmation), ce poste de préjudice indemnise la perte d’espoir et de chance de réaliser normalement un projet de vie familiale (perte de chance de se marier, de fonder une famille, d’élever des enfants) en raison de la gravité du handicap permanent dont est atteint la victime après sa consolidation ; que sur la base d’un préjudice d'(établissement) qui aurait été évalué, comme l’a justement fait le tribunal, à 80.000 euros pour une personne qui serait toujours vivante, c’est une indemnité de 12.307,69 euros qui sera allouée à la victime ;

ET AUX MOTIFS PARTIELLEMENT ADOPTES QU’à titre préliminaire, il y aura lieu de noter que les préjudices permanents subis par L… J…, quel que soit le caractère particulièrement lourd de ceux-ci, ne pourront être indemnisés que sur la période allant de la date de la consolidation de son état à la date de son décès ; qu’en effet, même si finalement, du fait du décès de la victime, les indemnisations en cause seront perçues par les ayants-droit de celles-ci, lesdites sommes trouvent leur justification dans des préjudices appartenant à la seule victime et ceux-ci ont donc cessé à la date de son décès ; qu’à titre d’exemple, on ne saurait en effet indemniser sur la même base deux personnes handicapées au même degré quand l’une aurait survécu un mois à son accident alors que l’autre serait restée grabataire jusqu’à un âge avancé ; que L… J… ayant survécu 10 ans à compter de la date de consolidation de son état et étant décédée à 22 ans, date à laquelle son espérance de vie était de 65 ans, les sommes devant lui revenir concernant les préjudices permanents dont elle a eu à souffrir seront calculées, prorata temporis, suivant la formule suivante : (somme due x 10 )/65 ; (…) qu’ eu égard aux pièces produites par les parties et au vu du rapport médical établi le 28 janvier 2005 par le docteur W… V…, médecin expert nommé par ordonnance du 12 janvier 2004, il y aura lieu de faire droit aux réclamations formulées par les ayants droit de L… J… au titre des préjudices subis par celle-ci pour les montants suivants :

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

(…)

Préjudices extra-patrimoniaux permanents

(…)

Préjudice d’établissement (ce poste de préjudice vise à indemniser la perte de possiblité de réaliser un projet de vie familiale : il s’agit de la perte d’une chance de se marier, de fonder une famille, d’élever des enfants. Quand bien même le décès de L… J… est survenu à 22 ans, le caractère certain du préjudice en cause est acquis (80 000€ x 10) / 65
12.307,69

( . . . ) ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer sur les demandes dont ils sont saisis sans examiner, fût-ce sommairement, les éléments de preuve invoqués les parties au soutien de leurs prétentions ; qu’en retenant, pour allouer une somme de 785.000 euros aux ayants-cause de L… J… au titre des frais d’assistance temporaire par tierce personne avant consolidation, que ce préjudice devait être évalué, pour la période où L… était prise en charge au sein de l’établissement « Le Nid béarnais », en tenant compte du temps passé par L… au domicile de ses parents tel que pris pour base par les consorts J… dans leurs écritures (soit 8.061 heures du 1er février 1996 au 8 janvier 1997, 15.862 heures du 9 janvier 1997 au 31 décembre 1998, 10.674 heures du 1er janvier 1999 au 30 avril 2000, 988 heures du 1er mai 200 au 30 octobre 2000, 3.336 heures du 1er novembre 2000 au 30 juin 2003 et 688 heures du 1er juillet 2003 au 30 avril 2004, ou un total de 36.609 heures sur l’intégralité de la période), sans même examiner, fût-ce sommairement, les conclusions du rapport d’expertise du docteur W… V… aux termes desquelles celui-ci indiquait que « le problème d’une aide au domicile [des] parents de L… ne se pose que pour les séjours qu’elle y effectue le samedi et le dimanche de 12h à 20h », qu’ « elle n’y passe pas de nuit », que « l’état justifie la présence d’une tierce personne (aide-soignante) pour aider sa mère qui s’occupe de l’enfant lorsqu’elle est au domicile parental, 1 heure chaque après-midi, les soins réguliers imposés par l’état de L… étant prodigués au Nid Béarnais » et considérait ainsi qu’une assistance n’était nécessaire que deux heures par semaine, soit environ 104 heures par an, ou 848 heures sur la période litigieuse, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu’en affirmant, pour allouer une somme de 100.000 euros aux ayants-cause de L… J… au titre du déficit fonctionnel temporaire subi par cette dernière, que ce préjudice devait être évalué sur la base d’une indemnité de 600 euros par mois et que le déficit temporaire de L… avait duré 144 mois, tout en calculant l’indemnité due en multipliant la somme de 600 euros, non par 144, mais par 166 avant d’arrondir le produit obtenu (99.600) à 100.000 euros, la cour d’appel s’est contredite sur la durée du déficit fonctionnel temporaire et a ainsi violé l’article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE les dommages et intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu’il en résulte pour elle ni perte ni profit ; qu’en retenant, pour allouer une somme de 12.307,69 euros aux ayants-cause de L… J… au titre du préjudice d’établissement subi par cette dernière, que ce préjudice, correspondant à la perte d’espoir et de chance de réaliser normalement un projet de vie familiale, devait être évalué en prenant en compte la somme qu’elle aurait perçue si elle n’était pas décédée prématurément, rapportée au nombre d’années qu’elle avait effectivement vécues à compter de la consolidation de son état jusqu’à son décès (soit entre l’âge de 12 et de 22 ans), sans rechercher si L… J… aurait été susceptible de s’établir à la date où son état s’était consolidé, soit à l’âge de 12 ans, si elle n’avait pas été atteinte d’un grave handicap permanent, et si, en conséquence, c’était bien à cet âge que son handicap lui avait fait perdre l’espoir et la chance de réaliser un projet de vie familiale jusqu’à son décès, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de réparation intégrale.

Moyens produits au pourvoi n° Z 19-23.604 par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour Mme R… , MM. C…, A… et X… J…, Mmes S…, B…, O… et O… J…, tant en leur nom personnel qu’ès qualités

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué D’AVOIR débouté la victime, L… J…, de ses demandes au titre de son préjudice scolaire ;

AUX MOTIFS QUE madame L… J… n’avait pas eu d’activité scolaire professionnelle (sic) ; qu’il n’y avait pas de préjudice de ce chef ; que ce poste faisait double emploi avec la demande d’indemnisation du handicap (DFT [déficit fonctionnel temporaire]) (arrêt, p. 11, §§ 13 à 15) ;

ALORS, D’UNE PART, QUE tandis que le déficit fonctionnel temporaire constitue un préjudice extra-patrimonial temporaire relatif à l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique, le préjudice scolaire constitue un préjudice distinct à caractère patrimonial, qui a pour objet de réparer la perte d’années d’étude, que ce soit scolaire, universitaire, de formation ou autre, consécutive à la survenance du dommage subi par la victime directe ; qu’en retenant néanmoins que le poste « préjudice scolaire » aurait fait double emploi avec le poste « déficit fonctionnel temporaire », cependant que ces deux postes de préjudices, de nature différente, ne pouvaient se confondre, la cour d’appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit ;

ALORS, D’AUTRE PART, QUE le préjudice scolaire intègre non seulement le retard scolaire subi, mais également une renonciation à toute forme de formation en raison de l’accident ; qu’il en résulte que ce poste de préjudice doit être réparé dès lors qu’il existe un lien de causalité entre l’absence de scolarisation et de formation de la victime et son accident à l’origine de son handicap ; qu’en déboutant néanmoins la victime, qui n’avait jamais pu être scolarisée ni bénéficier d’une quelconque formation en raison de son handicap consécutif à l’accident dont elle avait été victime à sa naissance, de sa demande en réparation au titre de son préjudice scolaire, par la considération qu’elle n’aurait jamais eu d’activité « scolaire professionnelle » (sic, arrêt, p. 11, § 14), cependant que la réparation dudit préjudice scolaire n’était pas subordonnée à une scolarisation de la victime antérieurement à l’accident au cours duquel elle avait contracté son handicap, mais seulement à une renonciation à toute forme de formation en raison de l’accident, ce qui était nécessairement le cas en l’espèce, la victime se trouvant dans un état végétatif depuis l’accident survenu à sa naissance, la cour d’appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR limité à la somme de 100.000 euros la réparation du déficit fonctionnel temporaire de L… J…, victime ;

AUX MOTIFS QUE ce préjudice avait vocation à indemniser les troubles subis dans les conditions d’existence ; qu’elle avait été hospitalisée en service de réanimation dès sa naissance ; que dès l’âge de six mois, elle avait eu recours à des séances de kinésithérapie et de psychomotricité, qu’elle présentait des troubles de la déglutition provoquant des encombrements bronchiques par fausse route ; qu’à l’âge de trois ans, elle avait été installée dans un corset en raison d’une scoliose-cyphose débutante ; qu’en février 1996, elle avait été prise en charge au Nid béarnais en semi internat, puis, à partir du mois de mai 2000, en internat sanitaire ; qu’en 2002, son état s’était aggravé sur le plan orthopédique ; que c’était à ce moment que les parents avaient d’ailleurs envisagé la transformation de leur maison dans la perspective de l’y recueillir ; que l’expert judiciaire avait retenu une incapacité temporaire totale sur l’ensemble de cette période ; que ce préjudice s’indemniserait en l’espèce sur la base forfaitaire de la moitié du SMIC puisque l’incapacité temporaire et totale (sic) ; qu’en 2004, le SMIC mensuel brut était de 1.151,20 euros soit 575,60 euros pour la moitié de celui-ci, mais compte tenu du temps écoulé, on pouvait retenir une base mensuelle de 600 euros ; que la durée du déficit temporaire qui devait être prise en compte était de 144 mois ; qu’il serait alloué la somme de 166 x 600 = 99.600 euros arrondie à 100.000 euros par réformation du jugement (arrêt, p. 15, §§ 5 à 7) ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QU’en retenant, pour limiter à 100.000 euros la réparation du préjudice subi par la victime tenant à son déficit fonctionnel temporaire, qu’un tel préjudice « s’indemniserait en l’espèce sur la base forfaitaire de la moitié du SMIC puisque l’incapacité temporaire et totale » (sic, arrêt, p. 15, § 7), la cour d’appel a statué par des motifs inintelligibles en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QU’en retenant une « base forfaitaire » (arrêt, p. 15, § 7) pour évaluer le préjudice subi par la victime au titre de son déficit fonctionnel temporaire, la cour d’appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE le déficit fonctionnel temporaire constitue un préjudice extra-patrimonial relatif à l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle pendant la maladie traumatique et dégagée de toute incidence sur la rémunération professionnelle de la victime ; qu’en conséquence, sa réparation ne peut être fondée sur le montant de la rémunération professionnelle minimum que constitue le salaire minimum de croissance (SMIC) perçu par les salariés ; qu’en se fondant néanmoins, pour limiter à 100.000 euros la somme devant être allouée à la victime au titre de son déficit fonctionnel temporaire, sur le montant du SMIC en 2004, la cour d’appel a méconnu le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR fixé à la somme de 100.000 euros la somme due au titre de déficit fonctionnel permanent de la victime ;

AUX MOTIFS QUE ce poste de préjudice consistait dans le déficit définitif, après consolidation, lié à la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant des atteintes aux fonctions physiologiques, à la perte de la qualité de vie et aux troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence personnelles, familiales et sociales, du fait des séquelles tant physiques que mentales qu’elle conservait ; que les consorts J… sollicitaient une indemnité totale de 750.000 euros décomposée en souffrances endurées par la victime après consolidation, séquelles physiologiques et psychologiques, et perte de qualité de vie ; que la polyclinique de Navarre avait proposé une somme de 80.397 euros, et le docteur T… de 58 828,73 euros ; que la réduction définitive de son potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l’atteinte à son intégrité était acquise depuis la naissance ; que L… J… n’avait aucune autonomie et son état était qualifié de végétatif, ce qui conduisait à la nourrir par gavage en évitant les troubles respiratoires lors de la déglutition ; qu’elle ne pouvait se tenir assise sans soutien et ne pouvait se mouvoir ; que son état de conscience était toujours resté incertain ; que son grand handicap n’avait jamais évolué ; que le taux d’incapacité avait été fixé par l’expert à 95 % ; que le préjudice serait fixé sur la base de 7 000 euros le point, s’agissant d’une enfant ayant entre 11 et 22 ans ; que pour une personne encore vivante présumée avoir une espérance de vie normale, cela conduirait à l’allocation d’une somme de 665 000 euros ; que comme indiqué ci-dessus, la survenance du décès à l’âge de 22 ans conduisait à réduire l’indemnisation à 15,38 % de cette somme soit 102 277 euros, somme arrondie à 100 000 euros (arrêt, p. 15, § 16 ; p. 16, § 4) ;

ALORS QU’après avoir énoncé que le préjudice de déficit fonctionnel permanent de la victime devait être évalué 102.277 euros, la cour d’appel ne pouvait, sauf à méconnaître le principe de la réparation intégrale du préjudice, « arrondir » ce préjudice à la somme de 100.000 euros ; qu’en statuant comme elle l’a fait, elle a méconnu le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué D’AVOIR statué avant dire droit et réservé les indemnisations à allouer du chef du recours à une tierce personne postérieurement au 12 février 2005, du chef de l’incidence professionnelle, du chef de la perte de revenus professionnels futurs, du chef des frais de matériel médical exposés après la date de consolidation, D’AVOIR rouvert les débats en considération des versements à connaître du montant de la PCH que les consorts J… avaient pu recevoir pour la période postérieure au 12 février 2005, D’AVOIR demandé aux parties de conclure sur la question de l’existence d’une double indemnisation possible de la victime, sur les postes de préjudice que les prestations versées au titre de la PCH auraient réparé, D’AVOIR ordonné d’office pour l’instruction du dossier et par application des articles 138 à 141 du code de procédure civile, la communication par le Conseil Général des Pyrénées Atlantiques, D’AVOIR dit que l’arrêt serait notifié au Conseil Général des Pyrénées Atlantiques qui devrait envoyer à la cour d’appel soit un relevé complet des prestations qu’il avait versées (directement ou par l’organisme qui serait son délégataire) pour toute la période postérieure au 12 février 2005 du chef du handicap subi par L… J…, née le […] et décédée le […] en application de l’article 245-1 du code de la sécurité sociale au titre de la prestation de la compensation de handicap (si les justificatifs n’étaient pas retrouvés, préciser si l’on retrouvait ou non trace de versements de ce chef pour la période), la teneur du contrat personnalisé passé avec la famille J… ou copie du contrat cadre ayant défini la nature des prestations financées, soit un état néant de versement pour toute la période considérée, l’identité des personnes qui avaient reçu les sommes versées au titre de la PCH (famille ou Nid Béarnais), si possible les causes des dépenses (matériel ou soins prodigués, tierce personne), D’AVOIR dit qu’en cas de difficulté légitime à l’exécution de cette demande de communication, l’organisme requis pouvait agir devant le magistrat de la mise en état pour le faire valoir et obtenir rétractation de la demande de communication ;

AUX MOTIFS QUE sur la prise en compte de la prestation de compensation du handicap (PCH), motif de réouverture des débats ; que du vivant de L… J…, la compensation du handicap avait relevé de deux régimes sociaux juridiques successifs : 1- les régimes juridiques et la jurisprudence : jusqu’au 12 février 2005, l’article 245-1 du code de la sécurité sociale disposait : « une allocation compensatrice est accordée à tout handicapé dont l’âge est inférieur à un âge fixé par décret et qui ne bénéficie pas d’un avantage analogue au titre d’un régime de sécurité sociale lorsque son incapacité permanente est au moins égale au pourcentage fixé par le décret prévu à l’article L. 821-1 du code de la sécurité sociale, soit que son état nécessite l’aide effective d’une tierce personne pour les actes essentiels de l’existence, soit que l’exercice d’une activité professionnelle ou d’une fonction élective lui impose des frais supplémentaires » ; que la jurisprudence avait estimé que l’allocation compensatrice de tierce personne était dépourvue de caractère indemnitaire sous ce régime antérieur ; qu’à compter du 12 février 2005 et jusqu’à la date du décès de L… J…, le régime de cette prestation relevait d’une rédaction nouvelle de cet article dont la dernière version en vigueur depuis 2008 énonçait : « I. Toute personne handicapée résidant de façon stable et régulière en France métropolitaine, dans les départements mentionnés à l’article ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, dont l’âge est inférieur à une limite fixée par décret et dont le handicap répond à des critères définis par décret prenant notamment en compte la nature et l’importance des besoins de compensation au regard de son projet de vie, a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d’une prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces. / Lorsque la personne remplit les conditions d’âge permettant l’ouverture du droit à l’allocation prévue à l’article L. 541-1 du code de la sécurité sociale, l’accès à la prestation de compensation se fait dans les conditions prévues au III du présent article./ Lorsque le bénéficiaire de la prestation de compensation dispose d’un droit ouvert de même nature au titre d’un régime de sécurité sociale, les sommes versées à ce titre viennent en déduction du montant de la prestation de compensation dans des conditions fixées par décret. / Un décret en Conseil d’Etat précise la condition de résidence mentionnée au premier alinéa. / II. Peuvent également prétendre au bénéfice de cette prestation : 1º Les personnes d’un âge supérieur à la limite mentionnée au I mais dont le handicap répondait, avant cet âge limite, aux critères mentionnés audit I, sous réserve de solliciter cette prestation avant un âge fixé par décret ; 2º Les personnes d’un âge supérieur à la limite mentionnée au I mais qui exercent une activité professionnelle au-delà de cet âge et dont le handicap répond aux critères mentionnés audit I./ III. Les bénéficiaires de l’allocation prévue à l’article L. 541-1 du code de la sécurité sociale peuvent la cumuler : 1º Soit avec la prestation de compensation prévue dans le présent article, dans des conditions fixées par décret, lorsque les conditions d’ouverture du droit au complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé sont réunies et lorsqu’ ils sont exposés, du fait du handicap de leur enfant, à des charges relevant de l’article L. 245-3 du présent code. Dans ce cas, le cumul s’effectue à l’exclusion du complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé ; 2º Soit avec le seul élément de la prestation mentionné au 3º de l’article L. 245-3, dans des conditions fixées par décret, lorsqu’ils sont exposés, du fait du handicap de leur enfant, à des charges relevant dudit 3º. Ces charges ne peuvent alors être prises en compte pour l’attribution du complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé » ; que cette prestation visait à compenser les conséquences du handicap par une prise en charge individualisée des besoins exprimés par la personne handicapée ; qu’elle était servie en exécution d’une obligation nationale de solidarité qui était accordée sans condition de ressources et dont le montant était fixé en fonction des besoins individualisés de l’allocataire ; que l’article L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles, relatif à la PCH, prévoyait une articulation avec les droits ouverts de même nature au titre d’un régime d’assurance maladie ; que néanmoins, la loi ne permettait pas aux départements qui versaient cette prestation d’engager une action subrogatoire contre les tiers responsables du handicap subi par le bénéficiaire de la prestation, car la PCH ne faisait pas partie de la liste des prestations de l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985 ouvrant droit à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ou son assureur ; que sous ce nouveau régime en vigueur depuis 2005, tant la Cour de Cassation (16 mai 2013, nº 12-18093) que le Conseil d’État (23 septembre 2013, nº 350799) reconnaissaient que la PCH avait désormais un caractère indemnitaire ; que la portée de diverses décisions de la Cour de cassation était discutée par les parties ; que par un premier arrêt (Cass. Civ. 1ère 19 mars 2015, nº 14-12792), « la prestation de compensation du handicap […] ne donne pas lieu à recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation, de sorte qu’elle n’avait pas à être imputée sur l’indemnité réparant l’atteinte à son intégrité physique, l’arrêt n’encourt pas le grief du moyen. » ; que selon deux autres arrêts (Cass. crim. 1er septembre 2015 nº 14-82251 et Cass. Civ. 1ère, 10 septembre 2015 nº 14-23623), si la PCH constituait une prestation indemnitaire, elle ne pouvait, faute de recours subrogatoire des tiers payeurs, être déduite des indemnités dues par le responsable de l’accident et par le fonds de garanties des assurances obligatoires de dommages (FGAO) ; qu’un autre arrêt du 2 juillet 2015 (Civ. 2ème, nº 14-19.797) statuant au visa des articles 29 et 33 de la loi 85-677 du 5 juillet 1985, seules devaient être imputées sur l’indemnité réparant l’atteinte à l’intégrité physique de la victime les prestations versées par des tiers payeurs qui ouvraient droit, au profit de ceux-ci, à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ; qu’or, la prestation de compensation du handicap non mentionnée par le premier de ces textes ne donnait pas lieu à recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ; que toutefois, dans cet arrêt, la cour rejetait le pourvoi en considérant que la question n’avait pas d’incidence (un partage de responsabilité de 50 % avait été ordonné) sur le montant des indemnités que les tiers responsables et leurs assureurs avaient été condamnés à verser à la victime en raison du droit de préférence de la victime sur la dette du tiers responsable ; que la situation était donc la suivante : – la PCH était une prestation indemnitaire, mais elle était payée par le conseil général qui n’était pas responsable du dommage et qui n’était pas un tiers payeur bénéficiant légalement d’un recours subrogatoire ; que quand, en l’absence de responsable identifié, le FGAO, dont les obligations étaient subsidiaire, était obligé d’indemniser la victime et le montant de la PCH payée par le conseil Général n’était pas déductible de ses obligations ; que le FGAO, en l’absence de responsable identifié ou solvable, devait donc supporter la charge définitive de l’indemnisation ; que quand il était identifié et solvable (par lui-même ou par son assureur), le responsable du dommage ne pouvait voir ses obligations réduites du montant versé par la PCH qui réparait le préjudice, sans quoi il y aurait enrichissement sans cause à son profit ; que cependant la victime ne pouvait pas être indemnisée deux fois de son préjudice car il y aurait enrichissement sans cause ; que l’objet du présent débat ne consistait ni à déterminer le régime des recours qu’ouvrirait le versement de la PCH, ni à déterminer l’identité de la personne devant supporter l’indemnisation de la victime ; que le débat portait uniquement sur le point de savoir si l’on devait tenir compte des sommes que la victime avait pu recevoir au titre de la PCH ; 2- application à l’espèce : qu’il fallait donc vérifier, avant toute décision définitive en l’espèce, le montant exact de ce qui avait pu être versé à la famille J… au titre de la PCH postérieurement au 12 février 2005 ; que jusqu’au 12 février 2005, la question du caractère indemnitaire de toute prestation compensatrice de frais de tierce personne ne se posait pas puisque le caractère indemnitaire d’une telle prestation était alors exclu par la jurisprudence ; que la cour liquiderait le préjudice pour cette période ; qu’il en irait différemment pour la période postérieure au 12 février 2005 ; qu’en l’espèce, U… N…, directeur de la Maison Départementale des Personnes Handicapées avait attesté le 20 octobre 2014 que madame L… J… avait déposé une demande de prestation de compensation du handicap le 7 février 2012, classée sans suite le 11 avril 2012 ; que rien n’était cependant précisé relativement à la perception ou à la non-perception de la PCH pour la période écoulée entre le 12 février 2005 et la date de cette demande rejetée ; que le document était très sommaire et ne suffisait pas à démontrer qu’aucun versement au titre de la PCH n’était intervenu ; qu’en considération des justificatifs très limités fournis par les consorts J… sur demande de leurs adversaires, il faudrait demander directement au Conseil général des Pyrénées-Atlantiques de faire connaître à la cour s’il avait versé des sommes à compter du 12 février 2005 au titre de la prestation compensatoire de handicap du chef de L… J… soit un état néant de tout versement pour toute la période considérée ; qu’en cas de versement communiqué la teneur du contrat personnalisé passé avec la famille J… ou copie du contrat cadre ; que dans la mesure du possible, un relevé des prestations qu’il avait versées (directement ou par l’organisme qui serait son délégataire) pour toute la période postérieure au 12 février 2005 du chef du handicap subi par L… J…, née le […] et décédée le […] en application de l’article 245-1 du code de la sécurité sociale au titre de la prestation de la compensation de handicap (si les justificatifs n’étaient pas retrouver, préciser si l’on retrouvait ou non trace de versements de ce chef pour la période), (arrêt, pp. 8 à 11) ;

ALORS QUE la prestation de compensation du handicap n’entre pas dans la catégorie des prestations ouvrant droit à action contre la personne tenue à réparation du dommage ou son assureur mentionnées aux articles 29 et 32 de la loi du 5 juillet 1985 ; qu’en conséquence, nonobstant sa qualification indemnitaire, elle ne peut pas être déduite des sommes dues à la victime par l’auteur du dommage et son assureur en réparation du préjudice causé ; qu’en retenant au contraire, pour l’évaluation des chefs de préjudices permanents subis par la victime, qu’il convenait de tenir compte de la prestation de compensation du handicap potentiellement perçue par cette dernière, dès lors que ladite prestation revêtait un caractère indemnitaire et qu’en l’absence d’élément précis relatif à la perception effective de cette prestation par la victime, il convenait de rouvrir les débats à cet égard, la cour d’appel a violé les articles 29 et 32 de la loi du 5 juillet 1985, l’article L. 245-1 du code de l’action sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale sans perte, ni profit.