COPROPRIETE : Droits de la copropriétaire sur sa terrasse à jouissance exclusive (CA Pau, Chambre 1, 31 mai 2018, RG N° 16/00542)

Protection des logements illicitement occupés

COPROPRIETE : Droits de la copropriétaire sur sa terrasse à jouissance exclusive (CA Pau, Chambre 1, 31 mai 2018, RG N° 16/00542)

Claudine est propriétaire d’un appartement dans un immeuble soumis au statut de la copropriété situé […] . Le toit de son habitation est constituée au moins en partie par la terrasse à laquelle accède Florence, propriétaire d’un appartement situé au premier étage.

Se plaignant de l’écoulement des eaux de cette terrasse, qui, par fortes pluies formeraient des rideaux d’eau l’empêchant de sortir dans la cour de l’immeuble à laquelle elle a accès depuis son appartement, Claudine, imputant la situation à des travaux réalisés par Florence, a saisi le juge des référés et obtenu l’institution d’une expertise judiciaire confiée à l’expert Jean ; l’expert judiciaire a déposé son rapport le 23 mai 2014, en lecture duquel Claudine a saisi le tribunal de grande instance par assignation du 18 septembre 2014.

Le litige s’est retrouvé devant la cour d’appel.

Florence, la copropriétaire d’un appartement au premier étage, dispose du droit d’utiliser la terrasse en vertu des dispositions de son acte notarié qui reprend le règlement de propriété lui donnant le droit de l’utiliser ; une partie commune pouvant faire l’objet d’un usage privatif. En effet, le règlement de copropriété lui donne un droit de jouissance privatif sur la terrasse, qui constitue une partie commune. Il dispose qu’elle a l’usage de la terrasse et cet usage est privatif puisqu’on n’y accède que par son appartement dont elle n’a pas à faire partager la jouissance. Etant la seule à pouvoir y accéder, elle dispose du droit d’y poser un revêtement de son choix, sous réserve de ne pas porter atteinte à la structure de l’immeuble, notamment l’étanchéité, et sous les contrôles prévus par la loi quand se trouve en jeu l’aspect extérieure de l’immeuble. Le droit réel et exclusif de la copropriétaire sur la terrasse est donc démontré.

Par ailleurs, il y a lieu de constater un trouble anormal de jouissance du propriétaire de l’appartement situé en-dessous en raison de l’écoulement anormal des eaux de pluie provenant de la terrasse et résultant des aménagements réalisés par la copropriétaire. Bien que le préjudice ait cessé par la réalisation de travaux, il demeure réparable pour la période antérieure. S’agissant d’un préjudice immatériel s’étalant dans le temps, l’action ne peut pas aboutir pour la période antérieure au temps applicable pour prescrire à la date à laquelle a été délivrée l’assignation en référé. Le délai applicable reste celui de 10 ans prévu par l’art. 2270-1 du Code civil dans sa rédaction en vigueur jusqu’au 17 juin 2008, l’assignation étant intervenue moins de 5 ans après l’entrée en vigueur de la réforme de la prescription réduisant le délai de 10 à 5 ans. À l’égard du syndicat des copropriétaires, le délai de prescription est également de 10 ans par application de l’art. 42 de la loi du 10 juillet 2005 qui déroge à la prescription quinquennale de droit commun. Par conséquent, le préjudice est indemnisable et doit être réparé par la propriétaire à l’origine de ces installations ainsi que par le syndicat des copropriétaires ayant donné son autorisation à de tels aménagements.