Code général des impôts
Article 790 A bis 
Modifié par LOI n°2020-935 du 30 juillet 2020 – art. 19 (V)

Le Parlement vient d’approuver, avec l’article 19 de la 3e loi de finance rectificative pour 2020 votée le 30 juillet 2020 et promulguée le 31 juillet 2020, une nouvelle exonération de droits de mutation à titre gratuit ; elle est codifiée à l’article 790 A bis du Code général des impôts plus loin énoncé.

La nouvelle exonération, d’un montant de 100.000 EUR, est applicable aux seuls dons consentis entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021. Il s’agit en fait d’un abattement applicable aux dons en pleine propriété de somme d’argent au profit d’un enfant, petit-enfant, ou arrière-petit-enfant. A défaut de descendance directe, le donateur pourra bénéficier de l’abattement dans le cadre d’une donation au profit de ses neveux ou nièces.

Un même donataire peut recevoir en franchise de droits plusieurs dons de 100.000 EUR. Le montant de 100 000 EUR est donc attaché à la personne du donateur, quel que soit son âge. Le donateur sera lui limité à la somme de 100.000 EUR quel que soit le nombre de donataire.

Mais cet abattement est toutefois conditionné car les sommes reçues par le donataire doivent être affectées dans les trois mois, soit :
– à la souscription au capital d’une petite entreprise au sens de la règlementation européenne,
– à la réalisation de travaux de rénovation énergétique dans la résidence principale du donataire,
– à la construction de la résidence principale du donataire.

Le nouveau abattement est cumulable avec certains des abattements déjà en place
– L’exonération d’un montant de 31.865 EUR pour les dons familiaux en espèces (le donateur doit avoir moins de 80 ans).
– Les abattements personnels de 100.000 EUR pour les enfants, 31.865 EUR pour les petits enfants, 5.310 EUR pour les arrières petits enfants et 7.967 euros sur la part de chaque neveux et nièce.

I. – Les dons de sommes d’argent consentis en pleine propriété à un enfant, un petit-enfant, un arrière-petit-enfant ou, à défaut d’une telle descendance, un neveu ou une nièce, sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit dans la limite de 100 000 € si elles sont affectées par le donataire, au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant le transfert :

a) A la souscription au capital initial ou aux augmentations de capital d’une petite entreprise au sens de l’annexe I du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, sous réserve du respect des conditions suivantes :
– l’entreprise exerce son activité depuis moins de cinq ans, n’a pas encore distribué de bénéfices, n’est pas issue d’une concentration et satisfait aux conditions prévues au c et aux e à g du 1 bis du I de l’article 885-0 V bis du présent code, dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2017 ;
– le donataire exerce dans l’entreprise, pendant une durée minimale de trois ans à compter de la souscription, son activité professionnelle principale ou l’une des fonctions énumérées au 1° du 1 du III de l’article 975, lorsque celle-ci est soumise à l’impôt sur les sociétés.

Le bénéfice de l’exonération est subordonné au respect de l’article 22 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

b) A des travaux et dépenses éligibles à la prime prévue au II de l’article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 et réalisés en faveur de la rénovation énergétique du logement dont il est propriétaire et qu’il affecte à son habitation principale ;

c) A la construction de sa résidence principale.

Le donataire ne peut bénéficier du dispositif qu’une seule fois par donateur.

Pour un même donateur, la somme des donations ayant bénéficié de l’exonération mentionnée au premier alinéa du présent I ne peut excéder un montant de 100 000 €.

Cette exonération ne s’applique pas aux versements effectués par le donataire au titre de souscriptions ayant ouvert droit aux réductions d’impôt prévues aux articles 199 undecies A, 199 undecies B, 199 undecies C, 199 terdecies-0 A, 199 terdecies-0 AB ou 199 terdecies 0 B du présent code. Elle ne s’applique pas non plus aux dépenses au titre desquelles le donataire a bénéficié des crédits d’impôt prévus à l’article 199 sexdecies ou 200 quater, d’une déduction de charges pour la détermination de ses revenus catégoriels ou de la prime prévue au II de l’article 15 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

Le donataire conserve les pièces justificatives à la disposition de l’administration.

II. – Les dispositions du I s’appliquent aux sommes versées entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021.

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Cour d’appel de Caen, 1ère chambre civile, 21 juillet 2020, RG n° 17/02992

La seule prétention figurant dans le dispositif des conclusions de l’appelant concerne sa demande d’attribution préférentielle du bien immobilier qui a été rejetée par le tribunal au motif qu’il ne justifiait pas des moyens financiers de payer une soulte.

Aux termes de l’article 831-2 1° du Code civil, tout héritier copropriétaire peut demander l’attribution préférentielle de la propriété ou du droit au bail d’un local qui lui sert effectivement d’habitation, s’il y avait sa résidence à l’époque du décès.

C’est le cas en l’espèce puisque Monsieur Z vivait avec sa mère au moment du décès de celle-ci dans le logement dont il revendique l’attribution préférentielle.

S’il bénéficie désormais de droits à hauteur de 2/3 dans la succession de sa mère depuis la révélation postérieurement au jugement déféré d’un testament l’instituant légataire universel, il ne verse aux débats aucune pièce justifiant de sa capacité financière à régler la soulte qui lui incomberait en cas d’attribution du bien immobilier à son profit, d’une valeur vénale de 347.000,00 EUR, dont il ne règle d’ailleurs pas les charges de copropriété.

C’est donc à juste titre que le tribunal l’a débouté de sa demande d’attribution préférentielle.

Le jugement sera donc confirmé dans toute ses dispositions, monsieur Z, malgré le caractère général de son appel, ne développant par ailleurs aucun moyen sur les autres points sur lesquels le tribunal a été amené à statuer.

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Cour d’appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 16 juillet 2020, RG n° 19/00439

M. G A est décédé le […] à […] laissant pour lui succéder : Mme H Z, son épouse dont il était séparé de biens, et ses enfants issus de son mariage avec Mme Y, sa première épouse les consorts A.

M. vivait « maritalement » avec Mme X.

Les consorts A indiquent ne pas nier que Mme X a bien partagé sa vie avec celle de leur père. Ils font néanmoins valoir qu’elle n’était pas dénuée d’arrière-pensées puisqu’elle a très largement profité de la situation financière de M. G A. Ainsi, contestent-t-ils la qualification de donation rémunératoire retenue par les premiers juges compte tenu du caractère clairement disproportionné entre les sommes reçues et des prétendus bons soins et attentions dispensés. Ils affirment en effet que contrairement à ce qu’a retenu le jugement déféré, les 112’332 EUR reçus par Mme X ne l’ont pas été sur une période de 10 ans, soit 120 mois, mais dans le meilleur des cas, sur une période de trois ans, soit 36 mois. Ce qui représente donc 3,5 fois plus que ce qu’a retenu le tribunal comme une valeur conforme aux services rendus et à l’assistance portée. Ils estiment en conséquence que le tribunal a commis une erreur manifeste d’appréciation dans la mesure où G A consacrait ainsi plus d’argent aux largesses qu’il accordait à Mme X que le montant de la retraite qu’il percevait et alors qu’il est un fait que si la maladie le faisait souffrir, elle n’a jamais diminué ses aptitudes physiques et intellectuelles sauf naturellement les derniers mois précédant son décès. Ils prétendent que les motivations qui ont inspiré ces élans de générosité importent peu dès lors qu’elles ont abouti à un appauvrissement du patrimoine du défunt sans contrepartie raisonnablement équivalente en valeur de la part de Mme X.

Ils répliquent en outre que la jurisprudence produite par l’intimée ne présente rigoureusement aucun intérêt dès lors que dans l’espèce visée, c’est pendant plus de 15 ans que le bénéficiaire a prodigué des soins au donateur. En ce qui concerne M. G A, ils répondent que si un suivi et des soins lui ont été prodigués, c’est en particulier durant les derniers mois de sa maladie qui a conduit à son décès. Ils estiment donc que la thèse défendue par Mme X se trouve en complet décalage avec la réalité médicale et arithmétique du dossier.

Mme X fait valoir que G A a entendu remplir un devoir de conscience envers elle et ses enfants avant que la maladie ne l’emporte. Elle ajoute qu’il a également entendu la rémunérer de toute l’assistance et de toute l’affection au quotidien que cette nouvelle famille lui a apportées durant les 14 dernières années de sa vie. Elle soutient en réplique aux observations adverses qu’elle n’a jamais rien demandé au défunt et que c’est spontanément que ce dernier lui a apporté son aide. Elle observe que devant la cour les consorts A ne contestent plus cette aide. Elle réplique toutefois que la contestation du caractère rémunératoire de ces versements au motif qu’ils n’auraient eu lieu que sur une période de trois années et devraient donc être rapportés au mois sur une période de 36 mois ne se fonde sur aucun texte légal ni aucune jurisprudence. Elle soutient au contraire que rien ne permet d’affirmer, comme le font les consorts A, que la donation rémunératoire doit forcément intervenir durant la même période que le service rendu alors qu’au contraire une telle rémunération intervient très souvent postérieurement aux services rendus, comme un remerciement de ceux-ci. Elle en déduit que pour obtenir une évaluation mensuelle de la rémunération, ces sommes doivent au contraire être rapportées au mois sur la période durant laquelle les soins ont été prodigués. Dès lors, elle invoque les pièces du dossier lesquelles montrent clairement d’après elle que la relation a débuté en 2002-2003 alors que G A était déjà atteint par la maladie, que les liens se sont intensifiés au fil des années et que c’est en 2006 que le de cujus est venu s’installer dans la même commune qu’elle, ce qui lui a permis alors de déléguer un certain nombre de tâches quotidiennes et même une partie de ses soins médicaux dès lors qu’elle est devenue sa référente au niveau de l’hôpital. Elle conclut donc que ramener au moins sur 10 années, la rémunération dont elle a été gratifiée n’apparaît nullement excessif au regard du montant de la retraite de G A qui était de 3’ 100 EUR par mois et de la somme perçue de 240’000 EUR sur la vente de son appartement.

Ceci exposé la cour rappelle que l’article 913 du Code civil dispose que les libéralités soit par acte entre vifs, soit par testament ne pourront excéder la moitié des biens du disposant s’il ne laisse à son décès qu’un enfant ; le tiers s’il laisse deux enfants ; le quart s’il en laisse trois ou un plus grands nombre .

En application de l’article 922 du Code civil, la réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existants au décès du donateur testateur ; que les biens dont il a été disposé par donation entre vifs sont fictivement réunis à cette masse, d’après leur état à l’époque de la donation et leur valeur à l’ouverture de la succession après qu’en ont été déduites les dettes ou les charges les grevant ; que si les biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l’époque de l’aliénation .

Invoquant l’existence de donations consenties par M. G A au profit de Mme X, il appartient au consort A d’en rapporter la preuve, ce qui suppose d’en réunir d’une part l’élément matériel, soit la tradition de la chose et d’autre part l’élément intentionnel, c’est-à-dire l’intention libérale de M. G A en direction de Mme X ;  l’élément intentionnel ne saurait être déduit du seul élément matériel .

En outre que, comme l’a dit le premier juge, les donations rémunératoires sont exclues de réduction lorsqu’elles sont effectuées en remerciement de services appréciables en argent et qu’elles équivalent à leur valeur .

En l’espèce que c’est aux termes de justes motifs qui sont adoptés par la cour que le tribunal a retenu qu’il était suffisamment établi par les attestations produites émanant tant de l’entourage amical du de cujus lors de son vivant, que de professionnels de santé que Mme X a porté assistance à M. G A durant les 10 années de sa maladie en lui prodiguant des soins et en l’assistant au quotidien .

Si les consorts A font en substance valoir que ce n’est que dans les trois dernières années de sa vie que G A a réellement eu besoin d’une telle assistance, il résulte toutefois de l’attestation de Mme B, que les 11 années de vie commune ont été très perturbées par la grave maladie de M. G A ; il ne saurait donc être contesté que c’est tout au long de la vie commune que Mme X a porté assistance au défunt .

Il est ensuite démontré que Mme X a assisté M. G A sur le plan médical ; le professeur I J, chef du service d’oncologie médicale de l’hôpital européen Georges Pompidou certifie qu’elle était sa personne de confiance et assistait à toutes ses consultations ainsi qu’à ses séances de chimiothérapie .

Ainsi les sommes versées par M. G A et qui ne correspondent pas aux charges de la vie courante s’analysent comme des versements pour services rendus .

Elles ne sont donc susceptibles de réduction que si elles se révèlent disproportionnées aux dits services ; qu’ainsi, cette disproportion ne peut être mesurée qu’à l’aune de toute la période durant laquelle l’assistance a été portée ; qu’or, ainsi que le rappelle Mme B, c’est tout au long des 10 ans de vie commune que la relation a été très perturbée par la grave maladie de G A ; qu’il ne fait donc pas débat que celui-ci a donc eu besoin d’être assisté et entouré durant toute la vie commune, peu important que le flux des dépenses se soit intensifié dans les trois dernières années de sa vie ;’au contraire cette circonstance, alors qu’au cours de ces trois dernières années la maladie poursuivait son oeuvre, est de nature à corroborer l’intention rémunératoire du défunt en direction de sa concubine .

Considérant que sur les 10 années de vie commune, c’est donc un montant total de 105’500 € qui a été versé par M. G A au profit de Mme X en rémunération des services rendus et de l’assistance qu’elle lui a apportée depuis le début de sa maladie en 2002, ce qui représente une moyenne mensuelle de 879 EUR, laquelle est à la mesure du service rendu et ne revêt aucun caractère excessif au regard de la retraite de 3. 100 EUR par mois perçue par M. G A et de la somme de 240’000 EUR perçue à la vente de son appartement .

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes des consorts A.

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Cour d’appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 16 juillet 2020, RG n° 19/05093

Mme X critique le jugement entrepris pour l’avoir déboutée de sa demande de fixation d’une indemnité d’occupation à la charge de son frère.

Elle affirme au soutien de son appel que la preuve de l’occupation exclusive par son frère du bien situé à Nîmes résulte des différentes pièces qu’elle verse aux débats. Elle sollicite de voir fixer l’indemnité d’occupation devant être mise à sa charge à 800 euros par mois à compter du […], date du décès de sa mère.

Il résulte de l’article 815-9, alinéa 2, du Code civil que l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité d’occupation.

En l’espèce, il résulte suffisamment de divers documents officiels, tels que la déclaration de succession, la procuration donnée par M. Y le 24 avril 2017 à tout clerc de notaire mentionnant l’adresse de celui-ci à Nîmes, les actes de signification délivrés à M. Y, soit à sa personne, soit par actes déposés en l’étude après vérification de son domicile, mais également de courriers échangés entre M. Y et ses parents de leur vivant, de correspondances récentes entre M. Y et sa soeur, et enfin de diverses attestations émanant de Mme D, de Mme E, de Mme F, amies ou parente de G Y, que M. Y demeure dans le bien immobilier sis à Nîmes, […], que sa mère avait acquis en 1993. Notamment le courrier de G Y en date du 2 mars 2001 adressé à M. Y confirme le fait que ce dernier habite l’appartement depuis son acquisition.

Il est attesté par les témoins que Mme X ne dispose pas des clefs de ce bien auquel elle n’a pas accès.

Il est ainsi établi que M. Y jouit à titre exclusif du bien immobilier dépendant de la succession de sa mère, de sorte qu’il est redevable envers la succession, en application du texte susvisé, d’une indemnité d’occupation courant à compter du […], date du décès de sa mère.

Le bien immobilier est évalué par l’agence Century 21 de Nîmes dans une fourchette de prix comprise entre 120. 000 et 130. 000 EUR et par l’agence Orpi de Nîmes dans une fourchette allant de 108 .143 à 132. 174 EUR.

Compte tenu des caractéristiques du bien, de sa superficie, de sa situation, de ses éléments de confort, de l’année de sa construction, il convient de retenir une valeur locative de 600 EUR par mois à laquelle, pour déterminer le montant de l’indemnité d’occupation, doit être appliqué l’abattement usuel de 20% pour tenir compte de la précarité de l’occupation du coïndivisaire. Par conséquent, l’indemnité d’occupation due par M. Y sera fixée à 480 EUR par mois à compter du […].

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Cour d’appel de Douai, 1re chambre, 1re section, 9 juillet 2020, RG n° 18/06765

M. Jean-Louis L. revendique une créance de salaire différé pour la période du 26 janvier 1974, date de sa majorité, au 12 août 1977, date à laquelle il a quitté le domicile familial, indiquant notamment que sa mère a exercé en qualité de chef d’exploitation agricole avec son époux décédé le 22 décembre 2007, et ce au moins pendant la période décrite par l’attestation de la Mutualité Sociale Agricole. Il soutient que sa demande n’est pas prescrite dès lors qu’il n’a pu exercer son droit qu’au décès de sa mère, le 27 octobre 2013, et qu’il a formé sa demande de salaire différé auprès du notaire chargé de la succession dès le 9 mars 2015.

Mme Marie-Pierre L. soulève la prescription de cette action, faisant valoir qu’elle devait être exercée dans les cinq ans du décès de M. Gilbert L. le 22 décembre 2007, soit avant le 22 décembre 2012, dès lors que celui-ci était le chef de l’exploitation agricole pendant la période où Jean-Louis L. prétend avoir travaillé.

L’article L. 321-13 du Code rural et de la pêche maritime dispose que « Les descendants d’un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l’exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d’un contrat de travail à salaire différé sans que la prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales puisse donner lieu au paiement d’une soulte à la charge des cohéritiers ».

L’action en paiement d’un salaire différé est, depuis la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, soumise à un délai de prescription de cinq ans qui auparavant était de trente ans. En vertu des dispositions transitoires de cette loi, la durée de la prescription ayant été réduite, la nouvelle durée de cinq ans est applicable à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi, soit le 19 juin 2008.

Le délai de prescription court du jour du décès de l’exploitant agricole, l’article L.321-17 du code précité disposant en effet que « Le bénéficiaire d’un contrat de salaire différé exerce son droit de créance après le décès de l’exploitant et au cours du règlement de la succession; cependant l’exploitant peut, de son vivant, remplir le bénéficiaire de ses droits de créance, notamment lors de la donation-partage à laquelle il procéderait ».

En cas de co-exploitation ou d’exploitations successives par les ascendants, le descendant est réputé bénéficiaire d’un unique contrat de salaire différé. Il s’ensuit qu’il peut exercer son droit de créance sur l’une ou l’autre des successions, à la condition toutefois que ce contrat ait reçu exécution au cours de l’une ou l’autre des deux périodes d’exploitation.

En l’espèce, il résulte de deux attestations de la Mutuelle Sociale Agricole du Nord-Pas-de-Calais, produites par l’appelant, que M. Gilbert L. a été inscrit à la MSA en qualité de chef d’exploitation depuis le 1er mars 1955 jusqu’au 31 décembre 1989, et qu’à compter du 1er janvier 1990 jusqu’au 31 juillet 1991 c’est son épouse, Mme Bernadette L., qui a été inscrite en qualité de chef d’exploitation.

Ces attestations n’établissent pas que cette dernière était co-exploitante avec son époux sur la période du 1er mars 1955 au 31 décembre 1989 dans laquelle s’inscrit l’exécution du contrat de travail revendiqué par Jean-Louis L., et les témoignages produits par ce dernier ne le démontrent pas davantage, les témoins se bornant à faire état de son travail sur ‘la ferme de ses parents’ sans préciser que ceux-ci coexploitaient cette ferme. Or, il convient de rappeler que la dette correspondant à la créance de salaire différé est celle de l’exploitant personnellement et non celle du propriétaire du fonds rural.

Faute ainsi de prouver que sa mère exploitait le fonds rural du 26 janvier 1974 au 12 août 1977, M. Jean-Louis L. est irrecevable à exercer son droit de créance sur la succession de sa mère ; il ne peut l’exercer que sur celle de son père. Or, à supposer que la succession de M. Gilbert L. n’ait pas encore été liquidée, il est prescrit à le faire, sa demande ayant été présentée au notaire en 2015, plus de cinq ans après le décès de M. Gilbert L. survenu le 22 décembre 2007.

L’action de Jean-Louis L. sera donc jugée irrecevable, le jugement entrepris étant infirmé en ce qu’il l’a jugée mal fondée, déboutant Jean-Louis L. de sa demande.

Cour d’appel de Bordeaux, 3ème chambre famille, 2 juillet 2020, RG n° 19/02778

Conformément aux dispositions de l’article 843 du Code civil et de l’article 850 dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006, tout héritier doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement. Le rapport ne se fait qu’à la succession du donateur.

Il résulte des articles 1438 et 1439 du Code civil que, sauf clause particulière, la donation d’un bien commun est rapportable par moitié à la succession de chacun des époux codonateurs.

En l’espèce, il est constant que la donation consentie en 1993 par les époux Z/Y à leur fille X portait, ainsi que cela est précisé dans l’acte de donation, sur un bien commun aux deux époux.

Au surplus, la lecture dudit acte permet également de relever que chacun des époux a précisé la portion pour laquelle il entendait contribuer, à savoir la moitié de la nue-propriété pour chacun.

Enfin, force est de constater que l’acte de donation dont s’agit ne mentionne aucune clause particulière visant à modifier les règles du rapport par moitié telles que résultant des articles 1438 et 1439 susvisés. En effet, la clause de réserve d’usufruit au dernier vivant contenu dans ledit acte et invoquée par l’appelant ne saurait être interprétée en une stipulation selon laquelle un seul des époux se chargerait personnellement de la libéralité, et partant, portant exception aux règles de rapport susvisées. En outre, le changement de régime matrimonial intervenu postérieurement à ladite donation est sans effet sur celle-ci quand bien même il comporterait une clause d’attribution intégrale au conjoint survivant.

En conséquence, la donation consentie par M. et Mme Z à leur fille X le 21 octobre 1993 devra être rapportée pour moitié de sa valeur à la succession de M. G Z.

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Cour de cassation, Chambre commerciale, 1er juillet 2020, RG 18-12.683, inédit

L’action paulienne est une action engagée par un créancier contre un débiteur qui a fait un acte en fraude de ses droits, par exemple lorsqu’il a organisé son insolvabilité ou lorsqu’il a réduit la valeur de son patrimoine, dans le but de rendre vain l’exercice de toute voie d’exécution.
 

Par un acte du 2 septembre 2008, M. A a donné la nue-propriété d’un bien immobilier lui appartenant à Mme A, sa fille alors mineure.

Se prévalant d’une créance de suppléments d’impôt sur le revenu mis à la charge de M. A, au titre des années 2004 et 2005, à l’issue d’une procédure de vérification de comptabilité et invoquant une fraude paulienne, le comptable responsable du service des impôts des particuliers du 14e arrondissement de Paris-Alésia et le comptable responsable du pôle de recouvrement spécialisé de Paris Sud-Ouest (les comptables publics) ont assigné M. A et sa fille mineure, représentée par sa mère, afin que cette donation leur soit déclarée inopposable.

Devenue majeure, Mme A a repris l’instance.

M. A et Mme A ont fait grief à l’arrêt d’appel de déclarer inopposable aux représentants de l’administration fiscale l’acte de donation du 2 septembre 2008 et de dire ceux-ci fondés à poursuivre le recouvrement de leurs créances pour un montant total de 129 265 euros, hors pénalités, entre leurs mains, alors :

Pour la Cour de cassation :

En premier lieu, après avoir exactement énoncé que l’action pauliennesuppose qu’en s’appauvrissant le débiteur ait conscience du préjudice qu’il cause à son créancier et que ce dernier ne peut engager cette action que si le patrimoine de son débiteur est insuffisant pour permettre le recouvrement de sa créance, l’arrêt relève, d’abord, qu’à la date de la donation de l’immeuble litigieux, M. A avait reçu les propositions de rectifications mettant à sa charge des impositions supplémentaires, les créances en résultant s’établissant de manière certaine à la somme totale de 129 265 euros, et, ensuite, que le fonds de commerce exploité par M. A, seul autre élément de patrimoine dont il était fait état devant la cour d’appel, était grevé de diverses inscriptions d’un montant supérieur à sa valeur.

En l’état de ces énonciations, constatations et appréciations, faisant ressortir que M.A se trouvait dans un état d’insolvabilité apparente à la date de la donation, qu’il s’était volontairement appauvri en connaissance du préjudice causé au Trésor public et qu’il était encore dans l’incapacité de répondre de ses dettes fiscales à la date d’exercice de l’action paulienne, la cour d’appel a légalement justifié sa décision.

En second lieu, la cour d’appel ayant écarté les prétentions des comptables publics relatives aux impositions dues pour les années 2006 et 2007, le chef du dispositif de l’arrêt disant ces comptables fondés à poursuivre le recouvrement de leurs créances pour un montant de 129. 265 EUR, hors pénalités, entre les mains de Mme A, donataire, en conséquence de la déclaration d’inopposabilité de la donation, s’interprète nécessairement comme autorisant les comptables publics à poursuivre le recouvrement de ces seules créances, à l’exclusion de celles correspondant aux impositions écartées. Le pourvoi est rejeté.

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Donation déguisée?

Exposé des faits :

L’héritier ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une donation déguisée liée à l’occupation d’un immeuble par son demi-frère pendant 30 ans.

Le contrat de bail conclu entre l’occupant des lieux et ses parents prévoit la location d’un appartement moyennant un loyer révisable, outre les charges comprenant la moitié de la taxe aux ordures ménagères et ses propres factures.

Une clause prévoyait également que le locataire s’engageait à aider le bailleur dans les opérations de la vie courante telles que les commissions, les déplacements et courses diverses.

Solution retenue par la Cour d’appel (Donation déguisée?) :

Le demandeur n’établit ni :

Il en résulte que l’existence d’une intention libérale n’est pas démontrée.

Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 2e et 4e chambres réunies, 1er juillet 2020, RG n° 17/16920

En quoi consiste une donation déguisée ?

Elle se caractérise sous l’apparence d’un acte à titre onéreux, mais dissimule en réalité une libéralité qui peut par exemple être au profit d’un futur héritier.

Quels sont les procédés les plus fréquemment utilisés pour consentir une donation déguisée ?

Cour d’appel de Besançon, 1re chambre civile et commerciale, 30 juin 2020, RG  n° 18/01829

S’ils échappent au rapport, les avantages reçus du défunt par des bénéficiaires qui ne sont pas ses héritiers restent sujets à réduction, en application de l’article 920 du Code civil, lorsqu’ils constituent des libéralités, directes ou indirectes qui portent atteinte à la réserve d’un ou plusieurs héritiers. Toutefois, en matière d’assurance-vie, par exception résultant de l’article L.132-13 du Code des assurances, le capital ou la rente payable au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé n’est soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant, et ces règles ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés.

Il en résulte que l’action exercée par les intimés devant la cour en réduction des primes versées, et non plus en rapport des sommes reçues, exige d’eux, d’abord, qu’ils écartent la prohibition de la réduction en matière de primes d’assurance-vie en démontrant l’exagération de ces primes eu égard aux facultés du souscripteur et à la date du paiement, puis qu’ils établissent que les mêmes primes ont porté atteinte à la réserve héréditaire.

Le défunt, né le 11 mai 1929, ancien ouvrier en retraite depuis 1987, veuf en 2001 puis concubin dès 2002, percevait une pension de retraite connue avec précision pour les seules années 2005 et postérieures, s’élevant alors à environ 23 000 euros par an, soit 1 916 euros par mois, outre des revenus mobiliers variant selon les années entre 87 et 1 344 euros par an.

Il était propriétaire avec sa femme de leur maison, vendue en 2008 pour un prix dont lui est revenue une part de 112 254,92 EUR. Il s’est ensuite logé en location avec sa compagne pour un loyer mensuel de 699 EUR, jusqu’au décès de celle-ci le 24 août 2014.

A son propre décès survenu le 20 janvier 2016, il détenait une épargne mobilière de 28 606,55 EUR, hors le capital des quatre contrats d’assurance-vie qui s’élevait alors au total de 68 597,96 EUR.

– Pour le contrat Initiative Transmission souscrit le 12 octobre 2001 peu après le décès de sa femme, une seule prime de 40 000 francs (6 097,96 EUR) a été versée à la souscription par monsieur R..- Eu égard au revenu de monsieur R., propriétaire de sa maison et ne supportant pas alors la charge d’un loyer, ce qui lui laissait une capacité d’épargne depuis plusieurs années, le placement de cette somme en assurance-vie ne présente nulle exagération, ni en raison de l’âge du souscripteur qui n’avait alors que 72 ans, ni en raison du montant investi, qui reste modeste, ni en raison du choix du support financier, le seul recours à l’assurance-vie plutôt qu’à une autre solution de placement, ne suffisant pas à caractériser l’inutilité de la dépense ou tout autre chef d’exagération au sens de l’article L.132-13 précité.

L’absence d’exagération de la dépense résulte encore de la possibilité contractuelle laissée au souscripteur de racheter les sommes investies, ce qu’il a fait à hauteur de 5 100 euros à une date non précisée, laissant un solde de 2 006,28 euros.

– Pour le contrat Nuances 3D souscrit le 19 février 2002, une cotisation initiale de 9.000 EUR a été versée à la souscription, puis une ou plusieurs cotisations complémentaires portant le total des primes nettes à 17.400,20 EUR, monsieur R. ayant ensuite procédé à des rachats partiels laissant au 31 décembre 2014 un solde de 731,94 EUR.

Les primes payées au titre de ce contrat, bien que plus importantes que celles acquittées quatre mois plus tôt et s’y ajoutant, restent compatibles avec les capacités d’épargne de l’intéressé, nul ne soutenant qu’il se soit lui-même démuni en plaçant ainsi son épargne, et ce d’autant, comme précédemment, que la faculté de rachat lui permettait de retrouver au besoin la disposition des fonds.

– Le contrat Nuances 3D, souscrit le 20 mars 2008 alors que monsieur R. était âgé de 78 ans, a été alimenté par une unique prime de 60.000 EUR constituant une part des 112 254,92 EUR qu’il avait tirés de la vente de la maison.

Les intimés ne démontrent pas en quoi la décision de placer une large part de ce prix sous forme d’assurance-vie, serait exagérée au regard des facultés d’un souscripteur disposant non seulement du reste du prix, qui constituait à lui seul une autre somme importante, mais encore d’une épargne placée sur d’autres supports et d’une retraite lui permettant d’assumer ses besoins, de surcroît avec la possibilité de rachat dont il a fait partiellement usage pour un montant de 10 501,42 EUR.

– Le contrat Nuances 3 D souscrit le 23 novembre 2011, alors que monsieur R. était âgé de 82 ans, a été alimenté à la souscription par une prime unique de 8.800 EUR laquelle, modeste au regard de l’ensemble du patrimoine mobilier de l’intéressé et de sa retraite, et assortie d’une faculté de rachat dont il a fait usage pour un montant de 5.000 EUR avant le 31 décembre 2014, ne présente pas plus que les précédentes le caractère d’exagération manifeste ouvrant la possibilité d’une réduction pour atteinte à la réserve héréditaire.

En conséquence, la cour, ajoutant au jugement déféré, déboutera les intimés de leur demande de réduction des primes d’assurance-vie.

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Déclaration de succession tardive

C’est en vain que le légataire universel recherche la responsabilité du notaire mandaté en vue :

– du règlement de la succession

– pour inexactitude de la déclaration de succession initiale.

En effet, il ne peut être reproché au notaire d’avoir manqué à son obligation d’informer le légataire des forces de la succession :

– d’une part, dès lors qu’il résulte de la déclaration d’ISF notamment qu’il n’ignorait pas le contenu de la succession litigieuse,

– Il n’est pas non plus fondé à reprocher au notaire, d’autre part, de ne pas l’avoir informé de la procédure du paiement fractionné des droits de succession. Celle-ci s’analysant en un crédit accordé par l’Etat moyennant garantie, alors qu’il ne justifie pas :

– qu’il avait la possibilité de constituer à l’expiration du délai de six mois,

– une garantie d’un montant total des droits à payer et la capacité financière d’assumer le montant du remboursement de ce crédit.

Il ne rapporte pas davantage la preuve :

– du manque de diligence du notaire dans la gestion des délais de règlement de la succession

– qui était complexe et comportait à l’expiration du délai de six mois, un montant insuffisant de liquidités

– au regard du montant total des droits de succession à régler,

– étant rappelé que le notaire a, cependant, fait en sorte de régler deux acomptes à l’expiration du délai de six mois,

– avec des fonds provenant de la succession et de la vente des titres mobiliers de la défunte.

Déclaration de succession tardive

Cour d’appel d’Orléans, Chambre civile, 29 Juin 2020, RG n° 18/02754