ACCIDENT DE LA CIRCULATION : Perte de chance et préjudice de retraite (Civ. 2e, 11 septembre 2014, n°13-10.414)

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ACCIDENT DE LA CIRCULATION : Perte de chance et préjudice de retraite (Civ. 2e, 11 septembre 2014, n°13-10.414)

Préjudice de retraite – évaluation – recours à la perte de chance

Comme on le sait, le calcul du préjudice de retraite n’est pas facile.

Une première méthode pour déterminer ce préjudice peut être de capitaliser la PGPF annuelle par le prix de l’euro de rente viagère correspondant à l’âge de la victime au jour de la décision qui liquidera son préjudice : en déduisant de cette somme globale une proportion (généralement du 1/4) qui établira le préjudice de retraite de la victime, la proportion restante (les 3/4) fixant l’étendue de la PGPF (Pour une application récente : TGI Paris, 18 novembre 2013)

Une deuxième méthode, plus “fine”, peut consister à capitaliser la PGPF annuelle par le prix de l’euro de rente temporaire correspondant à l’âge de la victime au jour de la décision qui liquidera son préjudice limitée à l’âge de la retraite. Le prix de l’euro de rente n’est dans ce cas que temporaire.

Cette deuxième méthode est plus volontiers utilisée en cas de demande spécifique de la victime pour l’indemnisation de son préjudice de retraite subi au titre de l’incidence professionnelle.

Une troisième méthode, plus simple, consiste, elle, à raisonner en termes de “perte de chance”. Discuté par certains, cette méthode repose sur l’idée que le calcul “exact” du préjudice de retraite par comparaison entre la retraite à laquelle la victime aurait pu prétendre sans le fait dommageable et la retraite qu’elle percevra procède de l’extrapolation d’une pluralité de facteurs connus mais prospectifs ( durée, taux, assiette de cotisation, promotions possibles ou “attendues”, caractère certain du préjudice de carrière “attendue” ). Dans ce cas-là, l’ensemble de ces paramètres impliquent une reconstitution de la carrière que la victime aurait eu une chance sérieuse de mener.

Si pendant un temps, la Haute juridiction avait semblé hostile à une telle méthode, estimant que le recours à la notion de perte de chance n’était pas possible s’agissant d’un préjudice de retraite: (V. notamment : Civ. 2e, 16 janvier 1985, n° 83-14.867, censurant une cour d’appel ayant retenu la perte de chance au motif que: “le droit de percevoir une pension de retraite entière lorsque la victime aura atteint l’âge prévu en poursuivant son activité ne présente aucun caractère aléatoire”), elle est depuis largement revenu sur cette position, comme le confirme l’arrêt commenté où une victime faisait une demande particulière pour le préjudice de perte de droits à la retraite en ne l’englobant pas dans une demande générale au titre de la PGPF.

Dans le cas présent, ce recours à la perte de chance n’était pas contesté par le juge d’appel qui avait bien retenu ce préjudice intermédiaire pour indemniser la demanderesse de son préjudice de retraite.

C’est en revanche dans la fixation du montant de cette perte de chance que le juge de fond s’était égaré puisqu’il avait capitalisé le salaire de la victime depuis son âge prévisible de départ à la retraite jusqu’à son décès.

Or, comme le rappelle à juste titre le juge du droit, « la réparation d’une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée » (Pour une illustration récente : TGI, Paris, 25 juin 2014).

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